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Champ d’application et inconventionnalité de la procédure spécifique aux infractions en matière militaire en temps de paix

L’article 698-1 du code de procédure pénale, qui subordonne, à peine de nullité, la mise en mouvement de l’action publique à la saisine préalable pour avis du ministre de la Défense, constitue pour la partie civile une atteinte à la substance même de son droit d’accès au juge lorsque la carence des autorités de poursuite conduit à la prescription de l’action publique.

En l’espèce, après qu’un militaire de la gendarmerie s’est donné la mort avec son arme de service en 2013, dans les locaux de sa brigade située dans le ressort du Tribunal de grande instance du Mans, une enquête préliminaire a été ouverte.

Le 30 janvier 2014, à la suite du classement sans suite de l’affaire par le procureur de la République du Mans, une plainte a été déposée par, notamment, la compagne du gendarme décédé, des chefs de harcèlement moral au sein de la brigade de gendarmerie précitée et mise en danger de la vie d’autrui. Le 5 février 2014, le procureur de la République du Mans a pris un réquisitoire introductif de ces chefs.

Le 29 février 2016, après la réalisation de plusieurs actes d’instruction, le juge d’instruction du Mans a sollicité les réquisitions du procureur de la République aux fins d’avis sur la compétence de la juridiction militaire de Rennes. Le 4 avril 2016, le magistrat instructeur suivant le sens des réquisitions, s’est déclaré incompétent au profit du Tribunal de grande instance à compétence militaire de Rennes.

Il s’en est suivi un va-et-vient de l’affaire entre le Tribunal de grande instance du Mans et celui de Rennes jusqu’au 14 mars 2017, date à laquelle le procureur de la République près cette dernière juridiction a retenu sa compétence et classé le dossier sans suite.

Par courrier du 10 décembre 2018, la compagne du gendarme qui s’était suicidé, partie civile, a informé le président du Tribunal de grande instance de Rennes de l’absence de demande d’avis telle qu’exigée par l’article 698-1 du code de procédure pénale. Elle a également exposé qu’il convenait en conséquence de désigner un juge d’instruction, pour permettre à ce dernier de saisir la chambre de l’instruction, aux fins de faire constater la nullité du réquisitoire introductif du 5 février 2014.

Le 30 avril 2019, un juge d’instruction a été désigné et il a saisi la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Rennes. Par arrêt du 18 novembre 2022, cette chambre a prononcé la nullité du réquisitoire introductif et des actes subséquents, et elle a constaté la prescription de l’action publique. La partie civile s’est alors pourvue en cassation.

L’apport de l’arrêt commenté est double.

Précision sur le champ d’application de la procédure spécifique aux infractions en matière militaire en temps de paix

Il ressort d’abord de l’arrêt que des faits de harcèlement moral et de mise en danger de la vie d’autrui commis par un gendarme à l’encontre d’un autre gendarme qui s’est donné la mort avec son arme de service dans les locaux de sa brigade relèvent de la procédure spécifique aux infractions en matière militaire en temps de paix.

Cette...

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