Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Article

Le Conseil d’État valide les clauses d’interprétariat des Pays de la Loire

Le Conseil d’État considère que les clauses d’interprétariat de la région des Pays de la Loire présentent un lien suffisant avec l’objet du marché et poursuivent un objectif d’intérêt général.

par Emmanuelle Maupinle 6 décembre 2017

Lorsqu’elles sont susceptibles de restreindre l’exercice effectif des libertés fondamentales garanties par le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, les exigences particulières imposées par le pouvoir adjudicateur ne peuvent être admises qu’à la condition qu’elles présentent un lien suffisant avec l’objet du marché, qu’elles poursuivent un objectif d’intérêt général, qu’elles soient propres à garantir la réalisation de celui-ci et qu’elles n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif, indique le Conseil d’État.

S’appuyant sur ces considérations, les juges du Palais-Royal valident les clauses d’interprétariat, à ne pas confondre avec les « clauses Molière », introduites par la région des Pays de la Loire dans le cadre d’un marché de travaux de mise en accessibilité handicaps et de réfection des cours d’un lycée. La première clause particulière d’exécution prévoyait que l’intervention d’un interprète qualifié pouvait être demandée, aux frais du titulaire du marché, afin que la personne publique responsable puisse s’assurer que les personnels présents sur le chantier et ne maîtrisant pas suffisamment la langue française, quelle que soit leur nationalité, comprennent effectivement le socle minimal de normes sociales figurant notamment à l’article L. 1262-4 du code du travail. La seconde prévoyait que, pour garantir la sécurité des travailleurs et visiteurs sur le chantier lors de la réalisation de tâches signalées comme présentant un risque pour la sécurité des personnes et des biens, une formation faite par un interprète qualifié, était dispensée à l’ensemble des personnels affectés à l’exécution de ces tâches, quelle que soit leur nationalité. Le préfet, qui estimait que ces clauses constituaient une entrave à la libre concurrence, avait saisi le juge du référé précontractuel. Le magistrat avait refusé de faire droit à la demande d’annulation au motif qu’elles ne portaient pas atteinte aux principes de liberté d’accès à la commande publique et d’égalité de traitement des candidats (TA Nantes, 7 juill. 2017, n° 1704447, AJDA 2017. 1423 ).

Pour rejeter le pourvoi du préfet, le Conseil d’État estime, à la lumière des articles L. 1262-4 et L. 4531-1 du code du travail et de l’article 38 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, que les clauses présentent un lien suffisant avec l’objet du marché, qu’elles s’appliquent indistinctement à toute entreprise quelle que soit sa nationalité et qu’elles ne sont pas discriminatoires ni ne constituent une entrave à la libre circulation.

De plus, estime la Haute juridiction, à supposer même qu’elles puissent être « susceptibles de restreindre l’exercice effectif d’une liberté fondamentale garantie par le droit de l’Union, [ces clauses poursuivent] un objectif d’intérêt général dont elles garantissent la réalisation sans aller au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre ». En effet, la première visait « à garantir la réalisation d’un objectif d’intérêt général lié à la protection sociale des travailleurs du secteur de la construction en rendant effectif l’accès de personnels peu qualifiés à leurs droits sociaux essentiels ». La seconde devait permettre au maître d’ouvrage, en vertu notamment de l’article L. 4531-1 du code du travail, de s’assurer « que chaque travailleur directement concerné par l’exécution de tâches risquées sur le chantier est en mesure de réaliser celles-ci dans des conditions de sécurité suffisantes ».