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Défectuosité du vaccin anti-hépatite B et information du patient

Le patient à qui une information est due subit, lorsque le risque se réalise, un préjudice résultant d’un défaut de préparation aux conséquences d’un tel risque que le juge ne peut laisser sans réparation.

par Nicolas Kilgusle 5 février 2014

Au cours de l’année 2013, la Cour de cassation a eu l’occasion de rendre divers arrêts relatifs à la preuve de la défectuosité du vaccin anti-hépatite B. Dans un arrêt du 10 juillet 2013, le dernier en date, elle s’était ainsi prononcée sur la responsabilité du fabricant du vaccin, dans la droite lignée de la solution retenue en 2008 (Civ. 1re, 22 mai 2008, n° 06-14.952, Dalloz actualité, 30 mai 2008, obs. I. Gallmeister ; RDSS 2008. 578, obs. J. Peigné ; RTD civ. 2008. 492, obs. P. Jourdain ; RTD com. 2009. 200, obs. B. Bouloc ), estimant que l’impossibilité de prouver scientifiquement tant le lien de causalité que l’absence de lien entre la sclérose en plaques et la vaccination contre l’hépatite B laisse place à une appréciation au cas par cas, par présomptions, de ce lien de causalité (Civ. 1re, 10 juill. 2013, n° 12-21.314, Dalloz actualité, 25 juill. 2013, obs. T. Douville ; ibid. 2312, note P. Brun ; ibid. 2315, note J.-S. Borghetti ; ibid. 2014. 47, obs. P. Brun et O. Gout ; RDSS 2013. 938, obs. J. Peigné ; RTD civ. 2013. 852, obs. P. Jourdain ; RCA 2013. Études 6, par D. Bakouche ; JCP 2013, n° 1012, note B. Parance ; 29 mai 2013, n° 12-20.903, Dalloz actualité, 17 juin 2013, obs. N. Kilgus , note J.-S. Borghetti ; ibid. 1723, note P. Brun ; ibid. 2014. 47, obs. P. Brun et O. Gout ; RTD civ. 2013. 625, obs. P. Jourdain ; RTD com. 2013. 797, obs. B. Bouloc ).

Dans un arrêt rendu le 23 janvier 2014, promis à une très large publication, elle s’interroge cette fois sur la responsabilité du médecin ayant prescrit ou administré les injections vaccinales eu égard à son obligation d’information. En effet, celui-ci n’avait transmis à sa patiente aucune information sur l’intérêt de la vaccination ou sur ses risques.

La Cour de cassation considère que, sauf les cas dans lesquels le défaut d’information a fait perdre au patient une chance d’éviter le dommage en refusant le traitement, ce non-respect « cause à celui auquel l’information était due, lorsque ce risque se réalise, un préjudice résultant d’un défaut de préparation aux conséquences d’un tel risque, que le juge ne peut laisser sans réparation ». Partant, elle s’inscrit dans la lignée d’une solution déjà énoncée : lorsqu’une intervention est nécessaire, la victime ne peut invoquer une perte de chance puisque, même informée, elle n’aurait pas pu s’y soustraire (Civ. 1re, 3 juin 2010, n° 09-13.591, Dalloz jurisprudence, 22 juin 2010, obs. I. Gallmeister , note C. Lantero ; D. 2010. 1522, note P. Sargos ; ibid. 1801, point de vue D. Bert ; ibid. 2092, chron. N. Auroy et C. Creton ; ibid. 2011. 35, obs. P. Brun et O. Gout ; ibid. 2565, obs. A. Laude ; RDSS 2010. 898, note F. Arhab-Girardin ; RTD civ. 2010. 571, obs. P. Jourdain ). Rappelons, à ce propos, que les vaccinations anti-hépatites B étaient obligatoires dans les années 1990.

En revanche, cet arrêt de 2010, s’il bouleversait le fondement de la sanction du défaut d’information médicale, désormais délictuel, demeurait relativement vague quant au « contenu » du préjudice considéré. Au visa des articles 16, 16-3, al. 2, et 1382 du code civil, il considérait que toute personne a le droit d’être informée des risques inhérents à l’intervention et « que le non-respect du devoir d’information qui en découle cause à celui auquel l’information était légalement due un préjudice qu’en vertu du dernier des textes susvisés, le juge ne peut laisser sans réparation ».

La doctrine s’est alors interrogée sur le fait de savoir s’il convenait de définir un tel dommage comme un préjudice « d’impréparation » au risque réalisé, tenant aux souffrances endurées en raison de l’impossibilité d’anticiper le dommage subi (J. Penneau, La responsabilité du médecin, Dalloz, 2004, p. 35), ou si celui-ci résultait de la violation d’un nouveau droit subjectif de la personnalité, à savoir le droit du patient...

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