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Des conditions de détention indignes au centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly

Le Conseil d’État refuse de prononcer de nouvelles injonctions à l’égard de l’administration pénitentiaire, concernant le centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly, et confirme l’ordonnance rendue par le juge administratif de la Guyane le 14 décembre 2022.

Les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires d’outre-mer sont particulièrement alarmantes, notamment au regard de la surpopulation massive qui y règne et des atteintes aux droits des détenus qui en découlent (v. CNCDH, La question pénitentiaire dans les outre-mer, 2017, 39 p., spéc. p. 6). Au 1er janvier 2023, la densité carcérale globale en outre-mer avoisinait 122,5 %, soit 4 % de plus qu’en France métropolitaine (DAP, Tableau 6 : Effectifs des personnes détenues et écrouées et densité carcérale, in Statistiques des personnes détenues et écrouées en France - Chiffres clés de la Justice, 2023). Pour y remédier, le référé-liberté constitue le dispositif privilégié ouvert aux personnes détenues (B. Pastre-Belda, L’amélioration des conditions de détention grâce au juge administratif, D. 2022. 1744 ). La multiplication des recours n’est donc pas nouvelle. Mais, face au dépérissement du parc carcéral dans les outre-mer, les mesures d’urgence que le juge administratif peut prononcer semblent de moins en moins appropriées, et l’administration pénitentiaire paraît de plus en plus résistante pour les exécuter, en témoigne la décision à l’étude (v. J. Falxa, Effectivité des mesures de lutte contre l’indignité des conditions de détention in Chronique de droit pénal, procédure pénale, droit pénitentiaire, politique criminelle, RSC 2022. 905 ).

Le contexte

L’établissement pénitentiaire de Rémire-Montjoly (La Guyane) est notoirement connu pour ses conditions de détention. À peine institué, en 2008, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté y dénonçait déjà de « mauvaises pratiques » de l’administration pénitentiaire (CGLPL, Rapport de visite du centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly, nov. 2008, p. 43). En 2018, ses constatations étaient d’autant plus inquiétantes (CGLPL, Recommandations en urgence relatives au centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly, 17 déc. 2018, JORF 31 janv. 2019). Adeline Hazan faisait alors état d’une « surpopulation chronique », de « conditions de détention indignes », d’une « hygiène désastreuse », d’un « climat de violence extrême » où des sédatifs étaient injectés aux détenus par le service psychiatrique sur demande de l’administration pénitentiaire. L’Observatoire international des prisons (OIP) a donc multiplié les recours devant le tribunal administratif de la Guyane (v. par ex., TA Guyane, 12 déc. 2019, n° 1901763 ; CE 25 nov. 2020, n° 428002 ; 19 mai 2022, n° 456201 ; pour la multiplication des recours de l’OIP, v. D. Costa, Retour sur dix ans de jurisprudences suscitées par l’OIP sur la défense de la dignité et des droits fondamentaux des détenus, in CNCDH, Défendre en justice la cause des personnes détenues, Doc. fr., 2014, p. 35). Récemment, par une ordonnance du 23 février 2019, le juge administratif constatait encore l’atteinte portée à la dignité des personnes détenues, et prononçait plusieurs injonctions destinées à y remédier (TA Guyane, ord., 23 févr. 2019, n° 1900211, Dalloz actualité, 29 mars 2019, obs. J. Mucchielli). En appel, le juge des référés confirmait cette ordonnance sur de nombreux points (CE 4 avr. 2019, n° 428747, Dalloz actualité, 8 avr. 2019, obs. J. Mucchielli ; Garde des Sceaux, ministre de la Justice c/ Section française de l’Observatoire international des prisons, AJ pénal 2019. 342, obs. C. Otero )....

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