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Diffusion non consentie d’un enregistrement filmé consenti

Une personne qui accorde un entretien à une société de production d’émissions télévisées et qui n’est pas filmée à son insu ne peut invoquer une atteinte au droit à l’image lorsque la diffusion de cet entretien n’a pas été consentie, dès lors que cette diffusion s’inscrit dans un débat d’idées d’intérêt général et que l’image n’a pas été détournée de son contexte.

par Rodolphe Mésale 11 mai 2015

La première chambre civile revient sur le débat d’idées d’intérêt général qui est de nature à justifier une atteinte à la vie privée et au droit à l’image, mais aussi, au regard de son arrêt du 9 avril 2015, une mise à l’écart de la liberté contractuelle et de la force obligatoire du contrat. Dans cette affaire, le directeur de la publication d’une revue avait accordé un entretien filmé à la réalisatrice d’une société de production d’émissions de télévision, entretien dans lequel il avait répondu à différentes questions destinées à connaître sa position sur un ouvrage publié dans la revue qu’il dirigeait. Une « lettre d’autorisation d’utilisation d’image » avait été signée par les différentes parties, document qui stipulait qu’aucune prise de vue de l’entretien ne saurait être diffusée sans que la personne qui avait accordé l’entretien n’ait pu visualiser préalablement la ou les séquences retenues lors du montage de l’émission. La société de production ayant intégré différentes séquences de l’entretien dans un documentaire qu’elle a diffusé, le tout sans le faire visionner par la personne concernée avant la diffusion de l’émission, cette dernière personne a assigné la société sur le fondement de l’article 9 du code civil en invoquant une atteinte au droit dont elle dispose sur son image. La première chambre civile a rejeté le pourvoi formé contre l’arrêt de la cour d’appel de Versailles du 8 novembre 2012, arrêt qui avait écarté la demande de dommages-intérêts aux motifs que le demandeur n’avait pas été filmé à son insu, qu’il avait accepté de répondre aux questions de la réalisatrice destinées à connaître sa position sur un ouvrage publié dans la revue qu’il dirigeait et que l’entretien litigieux s’inscrivait dans un débat d’idées d’intérêt général sur le retentissement actuel de cet ouvrage. Les juges du droit ont en effet considéré que les magistrats du second degré ont exactement déduit que l’implication du demandeur dans ce débat justifiait d’illustrer son témoignage par la diffusion de son image, qui n’avait pas été détournée du contexte dans lequel elle avait été fixée, le tout sans qu’il y ait lieu de recueillir son autorisation et sans qu’il importe que les stipulations de la « lettre d’autorisation d’utilisation d’image » aient été méconnues.

Si le droit à l’image est protégé par l’article 9 du code civil de la même manière que le droit au respect de la vie privée, la diffusion de l’image d’une personne peut devenir licite dès lors qu’elle est consentie (V. Civ. 1re, 11 déc. 2008, n° 07-19.494, Bull. civ. I, n° 282 ; D. 2009. 100 ; RTD civ. 2009. 295, obs. J. Hauser ; ibid. 342, obs. T. Revet ; RTD com. 2009. 141, obs. F. Pollaud-Dulian ; CCC 2009, n° 68, obs. L. Leveneur ; RLDC 2009/58, n° 3340, obs. E. Pouliquen ; RDC 2009. 477, obs. Y.-M. Laithier ; 9 juill. 2009, n° 07-19.758, Bull. civ. I, no 175 ; D. 2009. 2110 ; RTD civ. 2009. 695, obs. J. Hauser ; JCP 2009. 441, n° 11, obs. E. Dreyer ; CCE 2009, n° 91, obs. A. Lepage ; RLDC 2009/64, n° 3579, obs. E. Pouliquen) et que les modalités de diffusion sont conformes aux termes de...

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