Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Article

Entente du marché des ronds à béton : la Cour de justice confirme la légalité d’une troisième procédure administrative mais réduit marginalement le montant de l’amende

Dans le cadre d’un pourvoi venant clore une troisième procédure juridictionnelle née d’une procédure menée par la Commission européenne pour sanctionner une entente sur le marché des ronds à béton, la Cour de justice de l’Union européenne rejette la quasi-intégralité des huit moyens d’un pourvoi, à l’exception d’un moyen fondé sur l’égalité de traitement, modifiant à la marge le montant de l’amende imposée par la Commission.

L’arrêt Ferriere Nord, rendu par la Cour de justice sur pourvoi, témoigne, par le rejet quasi systématique des moyens de la requérante, de la volonté des juges de l’Union de préserver la possibilité de sanctionner les comportements infractionnels tels que les ententes anticoncurrentielles, et ce indépendamment des circonstances particulières – notamment le caractère très long de la procédure dans son ensemble – dans lesquelles la décision d’interdiction et de sanction du comportement en cause intervient. En aboutissant néanmoins à une réduction (certes, relativement marginale) du montant de l’amende infligée par la Commission sur le fondement de l’égalité de traitement, cet arrêt rend également compte de la contribution de certains droits fondamentaux et principes généraux du droit de l’Union à l’exercice concret par les juridictions de l’Union d’un contrôle rigoureux de l’utilisation par la Commission du pouvoir d’appréciation reconnu à cette dernière en matière de sanctions.

Un contexte marqué par une procédure anormalement longue

L’arrêt intervient ainsi dans un contexte procédural particulier, marqué par des annulations successives de décisions adoptées par la Commission afin de sanctionner une entente mise en œuvre dans les années 1990 sur le marché des ronds à béton.

Une première procédure avait été diligentée par la Commission pour détecter et interdire l’entente en cause, à laquelle avait pris part la requérante. Cette première procédure avait abouti à l’adoption, en septembre 2002, d’une décision d’interdiction fondée sur les dispositions matérielles et procédurales/institutionnelles du Traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l’acier (Traité CECA), lequel expirait en juillet 2002. Saisi par voie de recours en annulation, le Tribunal de première instance des Communautés européennes (ex-Trib. UE) a annulé, en 2007, la décision évoquée au motif que celle-ci avait été adoptée sur la base de dispositions du Traité CECA (art. 65, §§ 4 et 5) qui n’étaient plus en vigueur au moment de l’adoption de la décision querellée, ce qui signifiait que la Commission n’avait pas compétence pour agir sur le fondement des dispositions en cause (TPICE 25 oct. 2007, SP e.a. c/ Commission, aff. jtes T-27/03, T-46/03, T-58/03, T-79/03, T-80/03, T-97/03 et T-98/03).

Dans le prolongement de cette première procédure, la Commission a mené une nouvelle procédure relative aux mêmes faits, cette fois sur le fondement des règles procédurales du Traité CE et du règlement (CE) n° 1/2003. Sur le fond, la deuxième décision à laquelle a conduit cette nouvelle procédure reposait sur des griefs reprenant en substance la teneur et les conclusions de la décision de 2002. Cette décision, adoptée en septembre 2009, a été contestée devant les juridictions de l’Union. L’entreprise Ferriere Nord faisait partie des requérantes et, au stade du pourvoi, celle-ci a obtenu l’annulation de la deuxième décision au motif que la Commission avait indûment manqué d’organiser une audition à laquelle les autorités de concurrence (ANC) des États membres étaient invitées, ce qui constituait une violation des formes substantielles (CJUE 21 sept. 2017, Ferriere Nord SpA c/ Commission, aff. C-88/15 P).

Par conséquent, une troisième procédure administrative a été organisée par la Commission à l’égard de la requérante et d’autres membres de l’entente en cause qui étaient allés jusqu’au stade du pourvoi dans le cadre de la deuxième procédure. Dans le cadre de cette troisième procédure, la Commission a notamment organisé une audition sur le fond de l’affaire, laquelle réunissait les entreprises encore mises en cause, les représentants des ANC et le conseiller-auditeur. En juillet 2019, la Commission a finalement adopté la décision litigieuse à l’égard de la requérante et des autres entreprises ayant bénéficié de l’annulation de la deuxième décision. Par la décision...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :