Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Article

Projet de quartiers de lutte contre le narcotrafic : l’absence de précision et de proportionnalité des mesures soulignée par le Conseil d’État

L’impact du narcotrafic en France est sujet à de nombreux débats. Le Conseil d’État vient clarifier les points de droit soulevés par la réforme en cours, dans un avis rendu le 13 mars dernier. 

En novembre 2023 s’est ouverte la commission d’enquête relative à l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier, à l’initiative de sénateurs. Le rapport de cette commission d’enquête a été publié le 14 mai 2024 et une proposition de loi a été déposée par deux sénateurs le 12 juillet 2024. Le gouvernement ayant fait de la lutte contre le narcotrafic son champ de bataille, une procédure accélérée a été engagée le 14 novembre 2024. Le Sénat a adopté en première lecture la proposition de loi le 4 février 2025. En vue du futur examen de la proposition de loi par l’Assemblée nationale, le gouvernement entend insérer un amendement visant à créer des quartiers de détention dédiés à la prise en charge des personnes détenues membres de la criminalité ou de la délinquance organisées les plus dangereuses. Le gouvernement tire son inspiration du régime italien dit « 41 bis ». Très attendu, l’avis du Conseil d’État a été rendu le 13 mars 2025.

Le Conseil d’État y rappelle que le législateur doit assurer la conciliation entre l’exercice des droits et libertés garantis par la Constitution aux personnes détenues, notamment la sauvegarde de la dignité de la personne contre toute forme d’asservissement et de dégradation ainsi que le droit de mener une vie familiale normale d’une part, la sauvegarde de l’ordre public d’autre part, et les finalités de l’exécution des peines privatives de liberté, à savoir la protection de la société, la punition du condamné et son insertion (§ 8).

La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, selon laquelle les régimes pénitentiaires de haute sécurité ne sont conventionnels qu’à la condition que les mesures de contrôle renforcé et de restrictions des contacts avec le monde extérieur soient fondées sur un besoin social impérieux dans une société démocratique et proportionnées au but légitime poursuivi, est ici rappelée par le Conseil d’État. En 2012, la Cour européenne avait en effet affirmé que les restrictions automatiques ne peuvent être appliquées sans offrir une dose de flexibilité afin de déterminer si ces mesures sont réellement opportunes ou nécessaires dans...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :