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Référé-expertise : effet relatif de l’interruption du délai d’action quant aux désordres visés dans l’assignation
Référé-expertise : effet relatif de l’interruption du délai d’action quant aux désordres visés dans l’assignation
L’assignation en référé-expertise visant à étendre la mission de l’expert à l’examen de nouveaux désordres n’est pas interruptive du délai de prescription ou de forclusion attaché à l’action en réparation des désordres visés dans l’assignation initiale.
par Nastasia De Andrade, Avocat et Docteur en droitle 24 juin 2024
La portée de l’interruption d’un délai de prescription et de forclusion – communément appelés « délais d’action » – demeure strictement encadrée, ce que rappelle la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt publié rendu le 2 mai 2024. Les faits sont assez classiques et bien connus des praticiens du droit de la construction. Néanmoins, les faits les plus communs peuvent receler des questions juridiques importantes, notamment concernant les délais d’action dont le droit de la construction demeure un terrain de jeu privilégié.
En l’espèce, une société a fait édifier un groupe d’immeubles dont les lots ont été vendus en l’état futur d’achèvement. La réception a été prononcée le 12 juillet 1995. L’acquéreur de certains lots a initié, par assignation délivrée le 12 juin 1997, une action en référé-expertise à l’encontre de son vendeur maître de l’ouvrage et de l’entreprise générale en raison de l’apparition de désordres se manifestant, notamment, par des décollements généralisés des peintures. Par ordonnance du 25 juin 1997, un expert judiciaire a été désigné. Les opérations expertales ont été ultérieurement rendues communes et opposables au maître d’œuvre et à son assureur.
Par la suite, l’entreprise générale a sollicité l’extension des opérations d’expertise judiciaire à l’examen des désordres affectant les nourrices installées par le titulaire du lot plomberie. La mission de l’expert a été étendue à ces nouveaux désordres par ordonnance du 23 juillet 1999. Un appel a été interjeté à l’encontre de cette ordonnance. L’acquéreur, par voie de conclusions d’intimé, avait demandé à la cour de lui donner acte de ce qu’il s’en rapportait à justice sur les mérites de l’appel. De telles conclusions ont été jugées comme interruptives de « prescription » en ce qu’elles tendent à la confirmation de la mesure d’expertise ordonnée en référé, par deux arrêts rendus dans cette même affaire (Civ. 3e, 18 mars 2021, n° 20-13.993, RDI 2021. 368, obs. C. Charbonneau ; 16 juin 2016, n° 15-16.469, Dalloz actualité, 28 juin 2016, obs. M. Kebir ; D. 2017. 422, obs. N. Fricero ).
Après dépôt du rapport d’expertise judiciaire, et en lecture de ce rapport, l’acquéreur a assigné, en 2005, l’ensemble des intervenants précités devant le Tribunal de grande instance de Paris. Les assignations ayant été annulées, l’acquéreur a réitéré son assignation au fond par acte du 18 mai 2009.
Par jugement du 17 mai 2013, confirmé par un arrêt de la Cour d’appel de Versailles du 26 septembre 2022 (n° 21/03221) rendu sur renvoi après cassation, l’action en réparation de l’acquéreur a été jugée « prescrite » s’agissant des premiers désordres de décollements généralisés des peintures au motif que plus de dix années avaient précédé l’assignation au fond du 18 mai 2009.
Un pourvoi en cassation a été formé par l’acquéreur, lequel soutenait que les demandes en justice formées dans le cadre d’une instance ayant pour objet l’extension d’une mesure d’expertise judiciaire à de nouveaux désordres, interrompent la prescription et la forclusion pour tous les droits concernés, c’est-à-dire aussi bien pour les désordres objet de l’extension de mission que pour les désordres initiaux.
La question posée aux juges du quai de l’Horloge était donc la suivante : la portée de l’interruption d’un délai d’action doit-elle être appréciée strictement, c’est-à-dire au regard des seuls désordres visés dans la demande en justice concernée, ou bien l’interruption peut-elle être étendue à tous les droits concernés par l’action en réparation finale du demandeur à l’expertise judiciaire ? Autrement dit, si l’assignation en extension de mission a pour effet d’interrompre le délai attaché à l’action en réparation des nouveaux désordres, l’effet interruptif s’étend-il également aux désordres initiaux objet de la demande principale en désignation d’un expert ?
La Cour de cassation rejoint la position de la cour d’appel et confirme que...
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Auteur(s) : Alice Fuchs-Cessot; Sabine Bertolaso; Camille Dreveau; Fanny Garcia; Camille Selighini