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Renvoi d’une QPC : délai pour la rétrocession SAFER

L’absence de sanction du dépassement du délai de cinq ans laissé à la SAFER pour rétrocéder le bien est susceptible de porter une atteinte disproportionnée au droit de propriété et aux libertés contractuelle et d’entreprendre.

par Stéphane Prigentle 4 avril 2018

L’article L. 142-4 du code rural et de la pêche maritime autorise les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (SAFER) à conserver un bien acquis à l’amiable ou par préemption « pendant la période transitoire et qui ne peut excéder cinq ans ». La Cour de cassation juge que le dépassement du délai de cinq ans prévu pour la rétrocession des biens acquis « n’est assorti d’aucune sanction » (Civ. 3e, 15 mai 2008, n° 07-11.945, Bull. civ. III, n° 89 ; D. 2008. 1554 ; AJDI 2008. 692 ; 17 mars 2016, n° 14-24.601, D. 2016. 708 ; AJDI 2016. 618 , obs. G. Ruffieux ; ibid. 698 , obs. S. Prigent ).

Il a été soutenu à l’occasion d’un pourvoi formé contre un arrêt de la cour d’appel de Rennes se refusant à annuler la décision de préemption de la société d’aménagement foncier et d’établissement rural de Bretagne (SBAFER) que l’article L. 142-4 du code rural et de la pêche maritime, tel qu’interprété par une jurisprudence constante, porterait une atteinte disproportionnée au droit de propriété protégé par l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, mais encore à la liberté contractuelle et à la liberté d’entreprendre protégées par l’article 4 de la même Déclaration, en tant qu’il autorise les SAFER à conserver un bien préempté au-delà du délai de cinq ans.

La troisième chambre civile, exerçant sa fonction de filtrage (P. Deumier, RTD civ. 2010. 504 ) au vu des critères posés par l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel (art. 23-4 et 23-5), dit qu’il y a lieu à renvoi de la question au Conseil constitutionnel, au motif que la question présente « un caractère sérieux » (V. not., sur l’interprétation de ces articles, Cons. const. 3 déc. 2009, n° 2009-595 DC, consid. 21, AJDA 2009. 2318 ; ibid. 2010. 80, étude A. Roblot-Troizier ; ibid. 88, étude M. Verpeaux ; RFDA 2010. 1, étude B. Genevois ; Constitutions 2010. 229, obs. A. Levade ; RSC 2010. 201, obs. B. de Lamy ; RTD civ. 2010. 66, obs. P. Puig ; ibid. 517, obs. P. Puig ).

Le Conseil constitutionnel a, tout d’abord, reconnu « le caractère fondamental du droit de propriété dont la conservation constitue l’un des buts de la société politique » (Cons. const. 16 janv. 1982, n° 81-132 DC, consid. 16) et, par la suite, évolué sur la liberté d’entreprendre (Cons. const. 16 janv. 2001, n° 2000-439 DC, consid. 14, AJDA 2001. 222, étude E. Fatôme ; D. 2002. 1944 , obs. V. Ogier-Bernaud ) ainsi que sur la liberté contractuelle (Cons. const. 19 déc. 2000, n° 2000-437 DC, consid. 37, D. 2001. 1766 , obs. D. Ribes ; Dr. soc. 2001. 270, note X. Prétot ; ibid. 304, chron. D. Tabuteau ; RDSS 2001. 89, obs. P.-Y. Verkindt ; RTD civ. 2001. 229, obs. N. Molfessis ; 13 juin 2013, n° 2013-672 DC, consid. 6 et 11, D. 2014. 1516, obs. N. Jacquinot et A. Mangiavillano ; Dr. soc. 2013. 673, étude J. Barthélémy ; ibid. 680, étude D. Rousseau et D. Rigaud ;...

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