Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Article

Précisions sur l’appréciation de l’exception de fraude en matière de crédit documentaire

Le droit de se prévaloir de l’exception de fraude n’est pas subordonné à la condition que cette fraude soit décelable par la banque émettrice au terme d’un simple examen formel.

par X. Delpechle 5 juin 2006

L’exception de fraude constitue, en matière de crédit documentaire, un mécanisme correcteur qui peut faire contrepoids au formalisme et à la rigueur de l’engagement souscrit par le banquier émetteur ou confirmateur d’un tel crédit. Elle est d’ailleurs admise de longue date, aussi bien par les Règles et Usances uniformes des crédits documentaires que par la jurisprudence (V. l’arrêt fondateur : Cass. com., 4 mars 1953, S. 1954, 1, 121, note P. Lescot ; RTD com. 1954, p. 688, obs. J. Becqué et H. Cabrillac), mais à des conditions très strictes, afin de ne pas ruiner la sécurité du crédit documentaire. Cet arrêt de cassation du 25 avril 2006, qui ne se départit nullement de cette tendance jurisprudentielle, fournit d’intéressantes précisions à la fois quant au contenu et à l’établissement de la fraude.

On précisera, à titre liminaire, qu’il s’agissait ici d’un crédit documentaire à crédit différé, par lequel le bénéficiaire – en l’espèce un vendeur de tissus – n’obtient le règlement de la prestation qu’il a fournie qu’à l’expiration d’un certain délai à compter de la date de la remise des documents justificatifs au banquier, et non pas immédiatement. A partir du moment où l’exception de fraude peut être opposée jusqu’à la date de réalisation du crédit documentaire (V. en ce sens, à propos d’un crédit documentaire réalisable par acceptation, Cass. com. 11 oct. 2005, D. 2005, AJ p. 2802, obs. X. Delpech  ; RTD com. 2006, p. 172, obs. D. Legeais  ; JCP E 2005,1677, note J. Stoufflet ; RJDA n° 12/05, p. 1139, rapp. M. Cohen-Branche), c’est-à-dire, ici, comme l’énonce la Cour de cassation, fidèle à sa jurisprudence (Cass. com., 7 avr. 1987, D. 1987, Jur. p. 399, note M. Vasseur ; JCP 1987, II, 20829, note J. Stoufflet), jusqu’à son exécution, en d’autres termes, lors du règlement du crédit par le banquier émetteur du crédit documentaire, ce laps de temps, qui peut être important (trois mois par exemple), entre la date de remise des documents et la réalisation du crédit, offre de larges possibilités au donneur d’ordre pour découvrir la fraude. Ce, grâce à quoi, il pourra obtenir le blocage des sommes litigieuses entre les...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :