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Autonomie du préjudice sexuel dans le cadre des accidents du travail

Le préjudice sexuel subi par la victime d’un accident du travail doit être indemnisé distinctement du préjudice d’agrément et du déficit fonctionnel.

par Gaylor Rabule 10 juillet 2012

La jurisprudence judiciaire tendait depuis un certain temps à conférer une autonomie  au préjudice sexuel notamment par rapport au préjudice d’agrément (Civ. 2e, 6 janv. 1993, n° 91-15.391, RTD civ. 1993. 587, obs. P. Jourdain ; RDSS 1993. 257, obs. F. Kessler ; 5 janv. 1994, n° 92-12.185, RTD civ. 1994. 619, obs. P. Jourdain ). Récemment encore, la deuxième chambre civile a donné une définition du préjudice sexuel entièrement reprise de la nomenclature Dintilhac (Civ. 2e, 17 juin 2010, n° 09-15.842, Dalloz actualité, 5 juill. 2010, obs. A. Huc-Beauchamps ; RTD civ. 2010. 562, obs. P. Jourdain ). Par là-même, on a pu en conclure que la cour confirmait définitivement l’autonomisation du préjudice sexuel par rapport au préjudice d’agrément (P. Jourdain, obs. sous Civ. 2e, 17 juin 2010, préc.).

Toutefois, deux arrêts sont venus nuancer cette autonomie. Fondés sur l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, ils ont inclus le préjudice sexuel consécutif à un accident du travail dans le préjudice d’agrément, lui-même objet d’une définition autonome de celle du droit commun (Civ. 1re, 8 avr. 2010, n° 09-11.634, D. 2010. 1089, point de vue P. Sargos ; ibid. 2102, chron. J-M. Sommer, L. Leroy-Gissinger, H. Adida-Canac et S. Grignon Dumoulin ; ibid. 2011. 35, obs. P. Brun et O. Gout ; RTD civ. 2010. 559, obs. P. Jourdain ; Civ. 2e, 8 avr. 2010, n° 09-14.047, D. 2010. 1086, obs. S. Lavric ; ibid. 1089, point de vue P. Sargos ; ibid. 2102, chron. J-M. Sommer, L. Leroy-Gissinger, H. Adida-Canac et S. Grignon Dumoulin ; ibid. 2011. 35, obs. P. Brun et O. Gout ; RTD civ. 2010. 559, obs. P. Jourdain ), alors qu’en droit commun les deux préjudices demeureraient distincts. Cette dualité a subsisté et la décision du 17 juin 2010 (supra), dont les faits ne concernaient pas un accident du travail, l’a maintenu de facto.

L’intérêt de la présente décision tient précisément au fait qu’il se prononce sur la réparation du préjudice sexuel subi par sur une victime d’accident du travail. La faute inexcusable de l’employeur ayant été reconnue par un tribunal des affaires de sécurité sociale, elle a cherché à obtenir l’indemnisation de ses préjudices personnels. La cour d’appel de Lyon a refusé de prendre en compte de façon autonome le préjudice sexuel, estimant qu’il concernerait par principe le déficit fonctionnel et ne pourrait, par conséquent, être indemnisé au titre du préjudice d’agrément. La réponse de la Cour de cassation au moyen unique à l’appui du pourvoi est doublement intéressante sur le plan de la méthodologie et sur le fond.

Fondant sa solution sur l’article L. 452-3 du code de la sécurité, elle souligne que le préjudice sexuel doit désormais être interprété à la lumière de la décision du Conseil constitutionnel du 18 juin 2010 faisant suite à une question prioritaire de constitutionnalité (Cons. const., 18 juin 2010, n° 2010-8-QPC, AJDA 2010. 1232 ; D. 2010. 1634 ; ibid. 2011. 35, obs. P. Brun et O. Gout ; ibid. 459, chron. S. Porchy-Simon ; ibid. 768, chron. P. Sargos ; ibid. 840, obs. Équipe de recherche en droit social de Lyon 2 ; ibid. 1713, obs. V. Bernaud et L. Gay ; ibid. 2012. 901, obs. P. Lokiec et J. Porta ; Dr. soc. 2011. 1208, note X. Prétot ; RDT 2011. 186, obs. G. Pignarre ; RDSS 2011. 76, note S. Brimo ; Constitutions 2010. 413, obs. C. Radé ). Le Conseil avait, en sus de valider le dispositif d’indemnisation forfaitaire, formulé à cette occasion des réserves sur la disposition susvisée en tant que ce texte prévoit une énumération limitative des chefs de préjudices dont la réparation peut être demandée à l’employeur en cas de faute inexcusable et...

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