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La CJUE valide le mécanisme provisoire de relocalisation des migrants

Le Conseil de l’Union européenne pouvait valablement, sans consulter ni le Parlement européen ni les parlements nationaux, mettre en place un dispositif destiné à répartir les migrants arrivés en Italie et en Grèce.

par Emmanuelle Maupinle 8 septembre 2017

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rejeté, dans leur ­intégralité, les recours de la Slovaquie et la Hongrie contre le mécanisme de relocalisation par quotas des demandeurs d’asile. Par un arrêt du 6 septembre, la CJUE considère que ce mécanisme ne constitue pas une « mesure qui serait manifestement impropre » à contribuer à son objectif qui est « d’aider la République hellénique et la République italienne à affronter une situation d’urgence, […] en allégeant la pression considérable pesant sur les régimes d’asile de ces deux États membres ».

Face à la crise migratoire qui a frappé l’Europe à l’été 2015, le Conseil de l’Union a adopté, le 22 septembre 2015, une décision qui prévoyait un mécanisme de « répartition », à partir de l’Italie et la Grèce et pour une durée de deux ans, de 120 000 personnes ayant manifestement besoin d’une protection internationale vers les autres États membres. La Slovaquie et la Hongrie, qui ont voté contre l’adoption de cette décision, ont saisi la CJUE. Elles contestaient notamment le choix de la base juridique retenue, à savoir le paragraphe 3 de l’article 78 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Selon elles, la procédure législative aurait dû être appliquée. Pour la CJUE, puisque cet article « ne comporte aucune référence expresse » à la procédure législative, la décision pouvait « être adoptée suivant une procédure non législative » et constituait donc « un acte non législatif ». En tant que tel, son adoption n’était ainsi « pas assujettie aux exigences relatives à la participation des parlements nationaux […] ni à celles relatives au caractère public de la délibération et du vote au sein du Conseil ».

Les requérants estimaient, en outre, que la décision ne pouvait être prise sur le fondement de l’article 78, § 3, puisqu’elle ne revêtait pas un caractère provisoire et que l’afflux de migrants était, au moment de son adoption, raisonnablement prévisible. Pour rejeter ces arguments, la CJUE relève que la décision attaquée est applicable pour « une période limitée », du 25 septembre 2015 au 26 septembre 2017. Elle estime également qu’en raison d’une « forte augmentation de l’afflux de ressortissants de pays tiers en Grèce et en Italie sur un court laps de temps, en particulier pendant les mois de juillet et d’août de l’année 2015 », le Conseil pouvait qualifier cette augmentation de « soudaine », « même si elle s’inscrivait dans le prolongement d’une période d’arrivées déjà massives de migrants ».

Les États membres requérants faisaient valoir que l’objectif poursuivi par la décision de 2015 « pouvait être réalisé de manière tout aussi efficace en ayant recours à d’autres mesures […] qui auraient été moins contraignantes pour les États membres ». La CJUE rappelle que la répartition par consensus de 40 000 personnes prévue par la décision 2015/1523 du 14 septembre 2015 s’est soldée par un échec. Aussi, « face à la situation d’urgence dans laquelle se trouvaient la République hellénique et la République italienne à la suite d’un afflux sans précédent de migrants pendant les mois de juillet et d’août de l’année 2015, […] il ne saurait être valablement soutenu que le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation en ayant considéré que cette situation nécessitait l’adoption d’une mesure temporaire de relocalisation de nature contraignante ».