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Inconventionnalité de la collecte systématique de données biométriques d’un mis en examen : quelles conséquences sur le droit français ?

Le 26 janvier 2023, la CJUE a estimé que la directive « police-justice » s’opposait à la collecte systématique de données biométriques et génétiques de toute personne mise en examen, interrogeant en cascade la compatibilité du droit français au droit de l’Union européenne.

par Cécile Crichtonle 8 février 2023

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) entame l’année par une nouvelle décision privilégiant les libertés fondamentales à la sécurité. La question préjudicielle qui lui était soumise portait sur le traitement de données génétiques et biométriques par les autorités compétentes à des fins de prévention et de détection des infractions pénales, d’enquêtes et de poursuites en la matière, qui relèvent du champ d’application de la directive « police-justice » (UE) 2016/680 du 27 avril 2016.

En l’espèce, les juridictions bulgares à l’origine du recours s’interrogeaient sur la compatibilité de la directive « police-justice » avec la collecte par les autorités policières de données dactyloscopiques et photographiques d’une personne mise en examen, ayant pour finalité la création d’un profil ADN intégré dans un fichier de police.

Ces données sont qualifiées de données génétiques et biométriques. Soumises au régime des données sensibles de l’article 10 de la directive « police-justice », elles ne peuvent être traitées qu’en cas de « nécessité absolue », « sous réserve de garanties appropriées pour les droits et libertés de la personne concernée » et uniquement pour l’un des trois cas visés à l’article. En font partie les cas de traitements autorisés par le droit de l’Union ou le droit d’un Etat membre (a), ce « droit » devant être matérialisé par une loi suffisamment claire et précise (pts 64 et 65, citant CJUE 6 oct. 2020, aff. jtes C-245/19 et C-246/19, AJDA 2020. 2365, chron. P. Bonneville, C. Gänser et S. Markarian ; RTD eur. 2021. 401, obs. A. Maitrot de la Motte ).

La question de la transposition des textes par le droit bulgare sera volontairement écartée (pts 52 à 76) au profit des questions de collecte forcée (pts 77 à 110) et systématique (pts 111 à 135) des données en cause.

Une collecte forcée autorisée sous conditions

L’affaire pendante portait sur une personne mise en examen ayant refusé de fournir ses données biométriques. Les spécificités de la procédure pénale bulgare ont conduit à trois questions sous-jacentes, fournissant quelques clefs de compréhension pour l’établissement d’une procédure d’autorisation judiciaire de collecte forcée de données biométriques et génétiques.

Premièrement, la mise en examen n’est autorisée qu’en présence d’éléments de preuve sérieux pour établir la culpabilité de la personne. De plus, la collecte forcée de données biométriques et génétiques n’est autorisée par le juge qu’en cas de mise en examen pour des infractions intentionnelles...

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