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Le juge peut moduler l’amende infligée en matière de contravention de grande voirie

Lorsqu’il retient la qualification de contravention de grande voirie s’agissant des faits qui lui sont soumis, le juge est tenu d’infliger une amende au contrevenant. Il peut toutefois, dans le cadre de ce contentieux répressif, moduler leur montant.

par Jean-Marc Pastorle 2 novembre 2017

Le Conseil d’État reconnaît la possibilité pour le juge de moduler même sans texte, eu égard à la gravité de la faute commise, le montant de l’amende qu’il inflige à la suite d’une contravention de grande voirie. Une limite : ce montant doit se situer entre le plancher et le plafond prévus par les textes.

M. B… s’est amarré sans autorisation à un emplacement du port de Boulogne-sur-Mer réservé à un autre bateau qui devait y débarquer le produit de sa pêche. Il n’a pas obtempéré à l’ordre qui lui avait été donné de faire mouvement et de libérer le poste. L’officier de port a alors dressé un procès-verbal de contravention de grande voirie relatant ces faits et le préfet du Pas-de-Calais a poursuivi le contrevenant devant le tribunal administratif de Lille au titre de la contravention de grande voirie. Condamné au paiement d’une amende de 8 000 € en application du 2° de l’article L. 5337-5 du code des transports, M. B… s’est pourvu en cassation.

Le Conseil d’État donne de la souplesse au juge de la contravention de grande voirie en faisant à nouveau évoluer son office. Dans cette matière, les pouvoirs de ce dernier ont été étendus tant au titre de l’action en réparation des dommages portés au domaine public (CE 7 déc. 2015, n° 362766, CMA CGM [Sté], Lebon ; AJDA 2015. 2411 ) qu’en matière de liquidation d’astreinte (CE 15 oct. 2014, n° 338746, Voies navigables de France, Lebon ; AJDA 2015. 996 , note M. Baldovini ; ibid. 2014. 2033 ).

En l’espèce, le pouvoir du juge s’étoffe concernant l’amende. Ainsi, précise le Conseil d’État, « lorsqu’il retient la qualification de contravention de grande voirie s’agissant des faits qui lui sont soumis, le juge est tenu d’infliger une amende au contrevenant. Alors même que les dispositions précitées ne prévoient pas de modulation des amendes, le juge, qui est le seul à les prononcer, peut toutefois, dans le cadre de ce contentieux répressif, moduler leur montant dans la limite du plafond prévu par la loi et du plancher que constitue le montant de la sanction directement inférieure, pour tenir compte de la gravité de la faute commise, laquelle est appréciée au regard de la nature du manquement et de ses conséquences ».

La brièveté du stationnement prise en compte

Le bateau de M. B… étant d’une longueur de vingt et un mètres, l’article L. 5337-5 précité prévoit que l’amende qui doit être infligée est de 8 000 €. Par conséquent, la solution dégagée par le Conseil d’État permet au juge de la contravention de grande voirie de moduler l’amende entre ce maximum possible pour les bateaux d’une longueur supérieure à vingt mètres et inférieure ou égale à cent mètres, et 500 €, maximum possible pour les bateaux d’une longueur inférieure ou égale à vingt mètres. Le Conseil d’État retient la brièveté du stationnement irrégulier pour juger « qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de fixer à 4 000 € l’amende infligée à M. B… ». Ce dernier est donc fondé à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif avait fixé à 8 000 € le montant de l’amende au lieu de 4 000 €.