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Présentation du projet de loi confortant le respect des principes de la République

Hier, jour du 115e anniversaire de la loi de 1905, le gouvernement a présenté son « projet de loi confortant le respect des principes de la République ». Par rapport à l’avant-projet, certaines dispositions ont été adoucies. Le gouvernement a également inséré un article sur les délits de provocation.

par Pierre Januelle 10 décembre 2020

Dans son avis, le Conseil d’État note que « les mesures du projet concernent pratiquement tous les droits et libertés publiques constitutionnellement et conventionnellement garantis, et les plus éminents d’entre eux : liberté d’association, liberté de conscience et de culte, liberté de réunion, d’expression, d’opinion, de communication, liberté de la presse, libre administration des collectivités, liberté de l’enseignement, liberté du mariage, liberté d’entreprendre, liberté contractuelle ». Quand il s’agit de réécrire plusieurs des lois fondatrices de la Ve République (lois de 1881, 1882, 1901 et 1905), le gouvernement a souvent la main tremblante… d’excitation. L’avis du Conseil d’État et les protestations contre les atteintes aux libertés publiques ont tempéré ses ardeurs.

Les assouplissements du Conseil d’État

Le Conseil d’État a suggéré d’adoucir le projet sur plusieurs points. À l’article 2, le long dispositif de carence républicaine qui aurait permis aux préfets de suspendre certains actes de collectivités est remplacé par une simple accélération des délais dans lesquels le juge administratif devra se prononcer, en cas d’atteinte au principe de neutralité des services publics.

Sur les dissolutions administratives d’associations à l’article 8, le gouvernement a reculé sur l’ajout des motifs « d’atteinte à la dignité de la personne humaine » et de « pressions psychologiques ou physiques sur des personnes ».

Sur l’instruction à domicile, l’existence d’un éventuel principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR) reconnaissant le droit à une instruction des enfants au sein de la famille ainsi que sa contestation naissante ont conduit le gouvernement à adoucir sa position. L’article 21 prévoit qu’elle restera possible, sur autorisation, en raison de l’état de santé, l’itinérance de la famille ou d’une situation particulière propre à l’enfant à condition que les personnes responsables justifient de leur capacité à assurer l’instruction en famille.

Le gouvernement a également assoupli les conditions de déclaration des associations cultuelles et limité la certification des comptes, pour les associations loi 1905, à celles qui reçoivent des dons étrangers importants. Mais le projet reste contesté par les principaux cultes.

Le Conseil a fait retirer du délit de séparatisme (art. 4) le fait que la personne ayant menacé ou intimidé un agent pour une application différenciée des règles aurait agi pour « des motifs tirés de convictions ou de croyances ». Sur l’article 18 (ex-art. 25), le Conseil a noté qu’il imposera « la démonstration d’une intention particulière de nuire ».

Des ajouts sur la haine en ligne

Deux points avaient fait l’objet d’une saisine rectificative du Conseil d’État : des dispositions sur les mineurs étrangers isolés (finalement absentes du texte) et la question des délits de provocation.

L’article 20 prévoit que les procédures de comparution immédiate ou à délai différé seront désormais applicables aux personnes suspectées d’avoir commis l’un des délits de provocation prévus par la loi de 1881 (provocation à la haine, au crime, au vol ou aux dégradations). Ne seront pas concernées, les personnes relevant du régime de responsabilité « en cascade » (présence d’un directeur de publication).

Le Conseil d’État a fait deux remarques : sur le délit de provocation à la haine, la comparution immédiate ne sera possible qu’en procédure de flagrance (la peine n’est que d’un an de prison). Par ailleurs, un journaliste qui tweeterait un message relevant d’un délit de provocation pourrait être jugé en comparution immédiate, la responsabilité en cascade ne s’appliquant pas.

Enfin, selon nos consœurs du Figaro, le gouvernement devrait réintégrer, par amendements, des dispositions de la loi Avia censurées par le Conseil constitutionnel, pour notamment imposer des règles de coopération aux plateformes.

 

L’étude d’impact à lire ici

L’exposé des motifs à lire ici