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Projet de loi PACTE : changement dans l’élection des juges des tribunaux de commerce

Un amendement adopté le 27 septembre dans la loi PACTE vient modifier les modalités d’élection des juges des tribunaux de commerce qui ne seront plus élus par les délégués consulaires. Ces derniers disparaîtront, au profit d’une élection par des membres élus des chambres de commerce et de l’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat. Une réforme qui pourrait se poursuivre dans la loi d’orientation sur la justice, à la suite du dépôt de deux amendements.

par Pierre Januelle 2 octobre 2018

L’aboutissement d’un mouvement entamé il y a cinq ans

Actuellement, l’élection des juges de tribunaux de commerce a lieu sur deux niveaux. Ils sont élus, pour deux ou quatre ans, par un collège électoral composé des juges et anciens juges consulaires ainsi que de délégués consulaires élus dans le ressort de la juridiction. Ces délégués consulaires sont eux-mêmes élus pour cinq ans par 2,9 millions de commerçants et dirigeants d’entreprise.

Plusieurs éléments ont conduit à cette réforme. En 2013, le rapport des députés Cécile Untermaier et Marcel Bonnot préconisait l’élection directe des juges consulaires par les membres des chambres de commerce et d’industries (CCI) et aux personnes inscrites sur le registre des chambres de métiers (v. Dalloz actualité, 26 avr. 2013, art. M. Babonneau isset(node/159341) ? node/159341 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>159341).

En cause : le taux de participation des délégués aux élections consulaires qui plafonnait à 20 % des électeurs. Le rapport soulignait également le faible nombre de candidatures et reprenait le constat du Conseil national des tribunaux de commerce, qui indique que, « dans la plupart des cas, c’est actuellement le président du tribunal de commerce qui, connaissant le nombre de postes à pourvoir, active les recherches au travers des réseaux et des syndicats professionnels ».

Cette réforme est également rendue nécessaire par l’élargissement, à compter de 2021, du champ de compétences des tribunaux de commerce. La loi Justice du 21e siècle (J21) avait revu le statut des juges consulaires, en matière de déontologie, de non-cumul dans le temps et de formation. Elle avait également étendu le champ de compétences des tribunaux de commerce à l’ensemble des litiges concernant les artisans. Dès lors, ceux-ci devaient rejoindre le corps électoral. À terme, ce corps pourrait aussi être étendu aux autres activités qui sont justiciables devant la juridiction commerciale (agriculteurs, travailleurs indépendants et professions libérales). Mais cette réforme relève plutôt de la loi de programmation 2018-2022 de la justice, étudiée dès cette semaine en commission au Sénat. Les rapporteurs LR au Sénat du texte Justice viennent d’ailleurs de déposer deux amendements pour élargir de la compétence des tribunaux de commerce (qui seraient renommés tribunaux des affaires économiques) et conjointement le corps électoral des juges.

La suppression des délégués consulaires

C’est le réseau des CCI qui a poussé pour l’adoption de cet amendement dans la loi PACTE. La charge de l’organisation des différentes élections, aux taux de participation faible, et la volonté de simplification ont été mises en avant. En commission, le ministre avait trouvé l’amendement UDI intéressant, mais inabouti. Il a été retravaillé pour être adopté en séance, sans qu’il y ait eu de véritable débat parlementaire. Selon ses signataires, l’amendement est soutenu par l’ensemble des acteurs : les ministères de la justice, de l’intérieur et de l’économie ainsi que la Conférence générale des juges consulaires de France.

L’article 13 de la loi PACTE prévoyait déjà une réorganisation profonde des CCI. Son 7° programmait également la dématérialisation des élections des délégués consulaires. L’amendement UDI permet une réorganisation profonde de l’élection des juges des tribunaux de commerce.

L’amendement supprime, à partir de 2021, la fonction de délégué consulaire. À partir de cette date, les juges des tribunaux de commerce seront désignés par des membres élus des CCI et des chambres de métiers et de l’artisanat (CMA) dans le ressort de la juridiction ainsi que par les juges et anciens juges du tribunal de commerce. Afin de garantir une équité, le poids des voix des élus des CCI ou des CMA pourra être pondéré afin de tenir compte du nombre d’électeurs des deux chambres. Mais les conditions dans lesquelles ce collège électoral sera composé et désigné ainsi que le calendrier des opérations électorales seront précisés par décret en Conseil d’État. Il a aussi été décidé que le mandat de juge de tribunal de commerce serait incompatible avec la présidence d’un établissement public des réseaux des CCI ou des CMA.

Il est à noter que dans la foulée, l’Assemblée a adopté un amendement du rapporteur qui va profondément remanier l’organisation des chambres de métiers et de l’artisanat (CMA), qui vont être régionalisées.