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Article
Qualité pour agir du liquidateur judiciaire d’un GIE au titre de l’action en contribution aux pertes
Qualité pour agir du liquidateur judiciaire d’un GIE au titre de l’action en contribution aux pertes
Il résulte de l’article L. 251-6 du code de commerce que si les créanciers d’un groupement d’intérêt économique (GIE) peuvent poursuivre, sur le fondement de ce texte, le paiement de leurs propres créances contre les membres de celui-ci, le liquidateur de ce groupement n’a pas qualité pour exercer cette même action pour obtenir la contribution de ceux-ci aux pertes du groupement ou à en supporter l’insuffisance d’actif.
Au cas d’espèce, le 4 mai 2016, un groupement d’intérêt économique a été mis en liquidation judiciaire. Le liquidateur a assigné l’un des membres du GIE, en paiement d’une somme équivalente à l’insuffisance d’actif de ce groupement sur le fondement de l’article L. 251-6 du code de commerce. Ce membre a appelé en intervention forcée les autres membres du GIE. La demande du liquidateur a été jugée irrecevable par les juges du fond. La Cour d’appel a estimé que le liquidateur n’a pas qualité à agir sur le fondement de l’obligation aux dettes des membres d’un GIE au titre de l’article L. 251-6 du code de commerce. Elle a également précisé que le liquidateur ne pouvait récupérer l’insuffisance d’actif qu’en se fondant sur les dispositions propres à l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif. Le liquidateur s’est pourvu en cassation en soutenant que l’arrêt d’appel violait les articles L. 251-6, L. 641-4 et L. 622-20 du code de commerce au motif que « le liquidateur judiciaire d’un groupement d’intérêt économique est recevable à recouvrer le passif subsistant après réalisation de l’actif auprès des sociétés membres de celui-ci, tenues des dettes sur leur propre patrimoine ».
Par un arrêt publié, la chambre commerciale repousse les prétentions du liquidateur. Elle juge, en effet, qu’« il résulte de l’article L. 251-6 du code de commerce que si les créanciers d’un groupement d’intérêt économique peuvent poursuivre, sur le fondement de ce texte, le paiement de leurs propres créances contre les membres de celui-ci, le liquidateur de ce groupement n’a pas qualité pour exercer cette même action pour obtenir la contribution de ceux-ci aux pertes du groupement ou à en supporter l’insuffisance d’actif ».
Le liquidateur judiciaire et l’action en contribution aux pertes
Pour commencer, il est vrai qu’en cas de constatation d’une insuffisance d’actif d’une personne morale en liquidation judiciaire, des sommes peuvent être récupérées par le liquidateur au moyen de l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif. Toutefois, cette action vise les dirigeants et suppose la démonstration d’une faute de gestion qui dépasse la simple négligence (C. com., art. L. 651-2). En l’absence de réunion des conditions de cette action en responsabilité, ou en complément, le liquidateur peut se tourner vers les associés lorsqu’ils encourent un risque illimité, ce qui est le cas du GIE. Or, dans ce cas, depuis 2011, la Cour de cassation autorise uniquement le liquidateur à exercer l’action en contribution aux pertes sur le fondement de l’article 1832 du code civil (Com. 20 sept. 2011, n° 10-24.888, Dalloz actualité, 28 sept. 2011, obs. A. Lienhard ; D. 2011. 2970, note F. Marmoz ; Rev. sociétés 2011. 691, obs. S. Prévost ; RTD com. 2011. 771, obs. M.-H. Monsèrié-Bon ; LEDEN oct. 2011, p. 5, obs. N. Borga ; BJS nov. 2011, n° JBS-2011-0457, p. 902, note F.-X. Lucas ; l’action a été étendue aux associés des sociétés en nom collectif, Com. 27 sept. 2016, n° 15-13.348, Dalloz actualité, 20 oct. 2016, obs. X. Delpech ; D. 2016. 1998 ; Rev. sociétés 2016. 768, obs. L. C. Henry ; ibid. 2017. 362, note B. Saintourens ; LEDEN nov. 2016, n° 110d5, p. 5, obs. I. Parachkévova ; BJS déc. 2016, n° 115u8, p. 699, note F.-X. Lucas) et lui refuse la possibilité d’agir sur le fondement de l’obligation aux dettes des associés. C’est ce que rappelle la chambre commerciale par un obiter dictum en l’espèce. Il est vrai que dans les formes sociales où les associés sont tenus indéfiniment du passif, la contribution aux pertes et l’obligation aux dettes peuvent aisément se confondre. En effet, dans ce cas, in fine, elles aboutissent à mettre à la charge des associés tout ou partie du passif de la société. Cependant, elles sont bien distinctes. Tant au regard de leur existence, du moment où elles s’exercent ainsi qu’au regard de leurs titulaires.
D’une part, l’obligation aux dettes n’existe pas dans toutes les sociétés alors que la contribution aux pertes s’impose pour les associés, quelle que soit la forme sociale. L’obligation aux dettes permet aux créanciers s’étant préalablement adressés à la société d’assigner directement les associés en paiement de leur dette. Les associés payeront alors directement la dette sociale. Les créanciers bénéficient donc d’un recours personnel contre chacun des associés qui sont les garants subsidiaires de la personne morale pour toutes ses dettes. L’action est individuelle (Com. 24 janv. 2006, n° 04-19.061, D. 2006. 445, obs. A. Lienhard ; Rev. sociétés 2006. 410, note J.-F. Barbièri ; ibid. 637, note T. Bonneau ; RTD com. 2006. 435, obs. M.-H. Monsèrié-Bon et L. Grosclaude ; ibid. 916, obs. A. Martin-Serf ) et n’est pas collectivisée. Elle est facilitée pendant la liquidation judiciaire, spécialement pour les sociétés civiles, car les créanciers n’ont pas, en cas de liquidation de la société, à démontrer les vaines poursuites (Cass., ch. mixte, 18 mai 2007, n° 05-10.413, D. 2007. 1414 , obs. A. Lienhard ; Rev. sociétés 2007. 620, note J.-F. Barbièri ; RTD com. 2007. 550, obs. M.-H. Monsèrié-Bon ; ibid. 597, obs. A. Martin-Serf ), ce qui d’ailleurs pourrait être étendu au GIE (C. com., art. L. 251-6, al. 2 qui reprend exactement la formule des vaines poursuites préalable à l’action contre les membres). D’autre part, la contribution aux pertes est...
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Auteur(s) : Alain Lienhard, Pascal Pisoni