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Sport : une convention collective ne peut s’opposer à la requalification du CDD

La convention collective du rugby professionnel, en imposant le recours aux contrats à durée déterminée (CDD) pour le recrutement de joueurs, ne peut faire obstacle à leur requalification lorsqu’ils contreviennent aux dispositions d’ordre public relatives aux conditions de recours et de forme du contrat à durée déterminée.

par Bertrand Inesle 5 mai 2014

L’écrit matérialisant le contrat de travail à durée déterminée doit être transmis par l’employeur au salarié, au plus tard, dans les deux jours ouvrables suivant l’embauche (C. trav., art. L. 1242-13). Bien que cette prescription ne figure pas parmi celles énumérées par l’article L. 1245-1 du code du travail, la remise tardive de l’instrumentum est assimilée à une absence d’écrit et entraîne, comme cette dernière (C. trav., art. L. 1242-12 et L. 1245-1), la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée (CDI. – Soc. 17 juin 2005, n° 03-42.596, Bull. civ. V, n° 203 ; D. 2005. IR 1802, obs. A. Astaix ; JCP S 2005. 1278, note F. Bousez). Mais la sanction de cette condition de forme n’est pas sans poser des difficultés dans certains secteurs d’activité où il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée (C. trav., art. L. 1242-2, 3°, et D. 1242-1). Tel est le cas des sports dont l’exercice, à titre professionnel, est certes régi par le code du travail mais également encadré par des conventions et accords collectifs de travail ou assimilés qui exigent des clubs et joueurs qui évoluent au sein des compétitions la conclusion de contrats à durée déterminée. De telles conventions ou accords ne sont-ils pas incompatibles avec l’existence d’un contrat à durée indéterminée et, par voie de conséquence, à la requalification prescrite par le code du travail ou déduite de ses dispositions, notamment en cas de non-respect des exigences de forme ?

La Cour de cassation écarte catégoriquement ce raisonnement. En l’espèce, la convention collective du rugby professionnel stipule que les contrats signés par les clubs et joueurs, exerçant leur activité sous l’égide de la ligue nationale éponyme, imposent la signature de contrats à durée déterminée dont la durée ne peut excéder cinq saisons (art. 1.1 et 1.3, Titre II). Un club sportif tenta de tirer parti de cet impératif pour échapper à la requalification d’un contrat à durée déterminée, conclu avec un joueur professionnel, en contrat à durée indéterminée et ce, en application de la jurisprudence précitée. La Cour répond, dans un premier temps, qu’une convention collective ne peut déroger, de façon défavorable pour le salarié, aux dispositions d’ordre public relatives aux conditions de recours et de forme du contrat de travail à durée déterminée. Elle estime, dans un second temps, que les dispositions illicites de l’article 1.3 de la convention collective du rugby professionnel ne peuvent faire obstacle à la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée remis au salarié après l’expiration du délai de deux jours prévu à l’article L. 1242-13 du code du travail.

L’arrêt ne se présente pas a priori comme novateur, malgré son niveau de publication qui le conduira à figurer au rapport de la Cour. Cette dernière a, en effet, déjà fait application de la solution dégagée dans sa décision du 17 juin 2005 au contrat à durée déterminée d’un sportif professionnel, qui plus est à un joueur de rubgy (Soc. 11 déc. 2013, n° 12-19.408, Dalloz jurisprudence). Elle affirme, en outre, de longue date que les conventions et accords collectifs ou assimilés qui encadrent l’exercice professionnel de sports ne peuvent déroger aux dispositions d’ordre public du code du travail relatives au contrat à...

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