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Transaction et discrimination dans le déroulement de carrière d’un salarié homosexuel

L’entrave dans le déroulement de la carrière du salarié et l’ambiance homophobe du lieu de travail sont de nature à laisser présumer une discrimination en raison de l’orientation sexuelle. Une transaction portant sur la rupture du contrat de travail et formulée en des termes généraux n’inclut pas le litige propre à la discrimination survenu au cours de la carrière.

par Marie Peyronnetle 17 mai 2013

M. D… a été engagé par le Crédit agricole mutuel Île-de-France en 1976. Bien qu’ayant passé avec succès les épreuves d’aptitude à la fonction de sous-directeur au sein du groupe en 1989, il n’a jamais obtenu ce poste, ou un poste équivalent. Son employeur l’a licencié pour faute grave en juin 2005 et une transaction en juillet 2005 a organisé les conséquences de cette rupture. M. D… a ensuite saisi le conseil de prud’hommes de Paris pour obtenir réparation d’une discrimination dont il aurait été victime en raison de son orientation sexuelle et qui aurait entravé le bon déroulement de sa carrière.

Le Conseil de prud’hommes a jugé irrecevable la demande de réparation du salarié dans la mesure où la transaction avait pour objet de régler les « conditions et modalités de la rupture [du] contrat de travail et de […] déclarer [le salarié] rempli de tous les droits qu’il pouvait tenir tant de son contrat de travail que du droit commun ou de la convention collective et réparé [l’] entier préjudice » découlant de cette rupture. Appel est interjeté et la cour d’appel de Paris va infirmer la décision du conseil de prud’hommes sur ce point et examiner la demande de réparation de la discrimination. C’est cette décision que la Cour de cassation va en tous points confirmer.

Sur la question de la transaction, l’employeur, qui s’est pourvu en cassation, considère que la discrimination a été réparée lors de la transaction. Notons donc que l’existence même de cette discrimination n’est pas formellement contestée, seules son étendue et ses conséquences le sont. La Cour de cassation rejette le moyen et confirme la décision d’appel, car « en dépit de l’insertion d’une formule très générale, la transaction ne faisait état que d’un litige portant sur la rupture du contrat de travail, la cour d’appel a [correctement] estimé que la discrimination alléguée par le salarié n’était pas incluse dans cette transaction ».

On ne saurait que trop rappeler l’absolue nécessité pour l’employeur de rédiger les accords de transaction, notamment dans la définition de leur objet, avec la plus grande précision pour éviter ce type de déconvenues assez courantes (Soc. 18 janv. 2012, n˚10-14.974 ; Soc. 8 déc. 2009, n° 08-41.554, D. 2010. Actu. 97 ; 17 janv. 2006, n° 03-46.436 ; Cass., ass. plén., 4 juill. 1997, n° 93-43.375, D. 1998. 101 , note D. Boulmier ; Dr. soc. 1997. 978, obs. G. Couturier ; RTD civ. 1998. 134, obs. P.-Y. Gautier  ; JCP 1997. II. 22952, note D. Corrignan-Carsin).

La formulation générale de l’objet de la transaction permet donc au salarié de demander la réparation d’une discrimination ayant affecté le déroulement de sa carrière.

Sur cette question, l’article L. 1134-1 du code du travail prévoit un mode de preuve facilité pour le salarié victime, il suffit à ce dernier de rapporter des éléments de faits laissant supposer l’existence d’une discrimination.

Le...

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