Une jeune femme se lève et s’arrête à hauteur de deux petits pupitres placés négligemment en travers. Elle est seule, sans avocat ni contradicteur :
« Je m’approche ?
- Oui, répond le juge en haussant les épaules, depuis son immense bureau placé en hauteur.
- Désolée, je n’ai pas l’habitude… Voilà toutes les pièces du dossier.
- Attendez, attendez. Vous êtes sans avocat, essayez d’y pallier pour m’expliquer un peu votre affaire sinon je ne vais pas m’en sortir.
- Oui, pardon. Euh, j’étais locataire d’un appartement que j’ai quitté. Il y a eu la visite de sortie avec le propriétaire qui m’a reproché des moisissures et des dégâts qui étaient là quand je suis arrivée ou dont je n’étais pas responsable directement. Du coup j’ai refusé de signer l’état des lieux de sortie. Après ça, je suis restée sans retour de sa part. Voyant qu’il ne se passait rien, je les ai mis en demeure de rendre ma caution environ deux mois plus tard.
- Votre dépôt de garantie, vous voulez dire ?
- Oui, c’est ça.
- Il est de combien ?
- De 855 €.
- Qu’est-ce que vous demandez aujourd’hui ? Le retour de votre dépôt de garantie ?
- …
- C’est le retour de votre dépôt de garantie que vous demandez ? C’est ça ?
- Euh, oui… Et éventuellement quelques dommages et intérêts, tente la plaignante.
- Bien. La décision sera rendue le 13 mai »
Les dossiers se poursuivent. Une avocate se présente avec un dossier rempli de documents qu’elle décline au juge en les lui remettant. « Vous êtes extra », sourit le juge. « Ah, mais je ne fais que mon métier d’avocat », répond cette dernière. La présence de l’avocat n’est pas obligatoire au tribunal d’instance. Aussi, certains justiciables préfèrent défendre eux-mêmes leur dossier afin de ne pas engager des frais supplémentaires, surtout lorsqu’ils sont débiteurs d’une lourde dette. Cependant, le président semble s’agacer lorsqu’un justiciable peine à s’exprimer clairement sur son dossier, méconnaît la procédure ou les termes juridiques appropriés : « Vous devez dire Maître, lorsque vous vous adresser à l’avocat. C’est la moindre des corrections », « Parlez plus fort si vous voulez que je vous entende », « Mettez-vous ailleurs maintenant, j’ai d’autres dossiers à traiter », « Ne me racontez pas votre vie », « Ah, mais vous n’avez qu’à prendre un avocat, ce n’est pas mon rôle de...