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« Le droit n’est pas encore parvenu à traduire l’unité de l’eau dans des règles cohérentes »

Les considérations générales du rapport du Conseil d’État portent cette année sur l’eau et son droit. Frédéric Tiberghien, rapporteur général, en commente les grandes lignes.

Le rapport qualifiant le droit de l’eau de « construction baroque, fruit de la sédimentation de législations disparates », peut-on dire qu’existe une unicité du droit de l’eau ? Physiquement et philosophiquement, l’eau est un milieu qui présente une unité fondamentale. Mais la décomposition et la connaissance scientifique du cycle de l’eau sont récentes et postérieures à l’élaboration du droit de l’eau. De ce fait, la même eau est, selon les moments du cycle, soumise à des statuts juridiques très différents. Des préoccupations variées ont présidé à l’élaboration de ce droit. Au XIXe siècle, c’était l’exploitation maximale de la ressource par l’agriculture. Puis, ce furent le développement du transport fluvial et la santé publique. Aujourd’hui, même s’il faut relativiser, la préoccupation majeure est devenue environnementale. S’il existe une unité et une homogénéité du milieu, le droit n’est pas encore parvenu à les traduire dans un corpus de règles entièrement cohérent. La montée des préoccupations environnementales renforce l’aspiration à tendre vers un droit non pas unique - c’est impossible - mais plus intégré et qui tienne mieux compte de l’unité du milieu et de la ressource. Si les années 1960 ont vu la mise en place des agences de l’eau, c’est-à-dire d’administrations spécifiques qui veillent à la préservation de cette ressource et à sa gestion équilibrée, on n’est pas allé au bout du chemin. On progresse vers l’unité du droit, mais c’est un chemin long et difficile.

Ce droit de l’eau, le Conseil d’État appelle à la fois à le simplifier et à le stabiliser.

Par quels moyens y parvenir ?

La simplification et l’accessibilité du droit sont des préoccupations chères au Conseil. Plusieurs pistes sont proposées. Les lois sur l’eau se succèdent sans jamais s’articuler parfaitement avec les précédentes. Eu égard à la complexité des sujets, le législateur vote souvent la loi nouvelle sans assurer son insertion dans la législation existante. D’où des difficultés d’application, d’interprétation et surtout de combinaison entre législations distinctes. Le rapport invite donc le législateur, quand il touche à cette législation, à le faire de manière cohérente, même si l’exercice est difficile. La deuxième piste consiste à poursuivre l’effort de codification. Le rapport, à l’aide de quelques exemples, illustre aussi l’impact que pourrait avoir cette simplification. Il existe plus de douze définitions des zones humides : avec une ou deux, de préférence celles du droit de l’Union européenne, on se simplifierait la vie. Autre exemple, le droit de l’eau étant formé de législations distinctes qui se...

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