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Clauses de désignation et de migration prévues par un accord de branche

Il résulte du respect du droit de l’Union européenne qu’un arrêté d’extension précédé d’une publicité qui ne permet pas aux opérateurs intéressés de manifester leur intérêt pour la gestion des régimes de prévoyance concernés avant l’adoption de la décision d’extension doit être écarté.

par Wolfgang Fraissele 27 mars 2017

Le dispositif destiné à garantir une prévoyance complémentaire aux salariés intègre des clauses de désignation qui consistent à choisir par la voie conventionnelle un organisme assureur auquel les entreprises entrant dans le champ d’application de l’accord doivent recourir pour le risque en cause (CSS, art. L. 912-1). Il en résulte pour l’entreprise adhérente d’une organisation patronale signataire, l’obligation de s’engager avec l’organisme de prévoyance désigné par un contrat négocié au niveau de la branche et ce quand bien même cette dernière dispose déjà d’un contrat conclu avec un autre organisme.

Depuis longtemps déjà ce système a, d’une part, été critiqué par les institutions d’assurances concurrentes en mettant en valeur les effets négatifs des situations de monopole et, d’autre part, les employeurs refusant de s’affilier au régime d’assurance désigné par la branche. Ce sujet connaît depuis 2011 une évolution jurisprudentielle.

En effet, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a reconnu la validité des clauses de désignation et de migration à condition de fournir au consommateur des garanties qu’il ne pourrait pas avoir autrement (CJCE 21 sept. 1999, aff. C-67/96, Albany International BV, AJDA 2000. 307, chron. H. Chavrier, H. Legal et G. de Bergues ; ibid. 808, chron. H. Chavrier, H. Legal et G. de Bergues ; Dr. soc. 2000. 106, note X. Prétot ; ibid. 2003. 751, chron. S. Van Raepenbusch ; RDSS 2000. 212, étude F. Muller ; RTD eur. 2000. 335, chron. J.-B. Blaise ; aff. jtes C-115/97 à C-117/97, Brentjen et aff. C-219/97 Masstchappij Drijvende Bokken, AJDA 2000. 307, chron. H. Chavrier, H. Legal et G. de Bergues ; Dr. soc. 2000. 106, note X. Prétot ; RDSS 2000. 212, étude F. Muller ; RTD eur. 2000. 335, chron. J.-B. Blaise ; 3 mars 2011, aff. C-437/09, AG2R/Beaudout Père et Fils SARL, AJDA 2011. 1007, chron. M. Aubert, E. Broussy et F. Donnat ; RFDA 2011. 1225, chron. L. Clément-Wilz, F. Martucci et C. Mayeur-Carpentier ; RSC 2012. 315, chron. L. Idot ; RTD eur. 2011. 829, obs. J.-B. Blaise ).

Dans cette lignée, la Cour de cassation (Soc. 10 mars 1994, n° 91-11.516, D. 1994. 302 , obs. P. Langlois ; ibid. 1995. 39, obs. X. Prétot ; Dr. soc. 1994. 385, obs. J.-J. Dupeyroux ; ibid. 600, note J. Leonnet ; RDSS 1995. 140, obs. G. Vachet ) et le Conseil d’État (CE 7 juill. 2000, n° 198564, Fédération française des sociétés d’assurance, Lebon ; RTD eur. 2002. 103, chron. L. Idot ) ont confirmé que les régimes de prévoyance conventionnels ne sont pas soumis au droit commun de la concurrence. Toutefois, l’ANI du 11 janvier 2013 posait le principe de l’interdiction des clauses de désignation dans les accords tout en posant l’obligation de réaliser des appels d’offres quelles que soient les garanties conventionnelles.

Le Conseil constitutionnel a ainsi invalidé l’article L. 912-1 du code de la sécurité sociale en raison de l’atteinte portée à la liberté d’entreprendre et à la liberté contractuelle (Cons. const. 13 juin 2013, n° 2013-672 DC, D. 2014. 1516, obs. N. Jacquinot et A. Mangiavillano ; Dr. soc. 2013. 673, étude J. Barthélémy ; ibid. 680, étude D. Rousseau et D. Rigaud ; ibid. 2014. 464, chron. S. Hennion, M. Del Sol, P. Pierre et M. Hallopeau ; ibid. 1057, étude J. Barthélémy ; Constitutions 2013. 400, chron. A.-L. Cassard-Valembois ; RTD civ. 2013. 832, obs. H. Barbier ). Seules des clauses de recommandation pouvaient être intégrées dans l’accord. Reste que le Conseil constitutionnel a pris le soin de préciser les conditions d’application dans le temps de sa décision. Précisément, il a modulé dans le temps les effets de cette décision en considérant que « la déclaration d’inconstitutionnalité de l’article L. 912-1 du code de la sécurité sociale prend effet à compter de la publication de la présente décision ; […] elle n’est toutefois pas applicable aux contrats pris sur ce fondement, en cours lors de cette publication ».

Par conséquent, les « contrats en cours », c’est-à-dire ceux conclus antérieurement à la...

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