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Financement de l’assurance vieillesse de base des avocats : le Conseil constitutionnel saisi

Présente un caractère sérieux la QPC portant sur l’article L. 723-3 du code de la sécurité sociale et soulevant une atteinte au principe d’égalité, dès lors que cette disposition prévoit un plafonnement des bases de calcul de la contribution au financement du régime d’assurance vieillesse de base des avocats pour l’un des modes d’exercice de la profession d’avocat mais non pour l’autre. La Cour de cassation procède donc au renvoi devant le Conseil constitutionnel.

par Gaëlle Deharole 28 mai 2018

À l’occasion d’un litige l’opposant la Caisse nationale des barreaux français (CNBF), une société avait formé devant la Cour de cassation un pourvoi contre le jugement rendu par la juridiction de proximité. Elle avait, à cette occasion, soulevé, par un écrit distinct et motivé (C. pr. civ., art. 126-2 et 126-10 ; Dalloz actualité, 4 avr. 2018, obs. D. Goetz isset(node/189922) ? node/189922 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>189922), une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

L’article 61-1 de la Constitution prévoit en effet que, « lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ». Il convient de rappeler que la QPC fait l’objet d’un titre V bis, du livre premier, du code de procédure civile.

Ce titre comprend deux sections respectivement consacrées à « la transmission par le juge de la [QPC] à la Cour de cassation » (art. 126-1 à 126-7) et au « renvoi par la Cour de cassation de la [QPC] au Conseil constitutionnel » (art. 126-8 à 126-13). Cette subdivision correspond aux deux étapes successives de la procédure de QPC : d’une part, la transmission par le juge de la QPC à la Cour de cassation et, d’autre part, la transmission de la QPC par la Cour de cassation au Conseil constitutionnel. C’est le juge qui connaît de l’instance au cours de laquelle la QPC est soulevée qui statue sur la transmission de la QPC à la Cour de cassation (C. pr. civ., art. 126-3). Celle-ci doit procéder au renvoi de la QPC devant le Conseil constitutionnel lorsque les conditions des articles 23-4 à 23-7 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 sont remplies (rapp. Dalloz actualité, 20 mars 2018, obs. A. Gaillard isset(node/189666) ? node/189666 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>189666). Plus spécialement, en renvoyant à l’article 23-2 de l’ordonnance, la première de ces dispositions prévoit qu’il est procédé à ce renvoi dès lors que :

  • la disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ;
     
  • elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ;
     
  • la question est nouvelle ou présente un caractère sérieux. La jurisprudence a, par exemple, précisé que la QPC est irrecevable dès lors que la Cour de cassation en a déjà tranché une portant sur une disposition similaire, soulevée dans la même procédure (Crim., QPC, 17 janv. 2012, n° 11-90.112, Dalloz actualité, 23 févr. 2012, obs. L. Priou-Alibert isset(node/150392) ? node/150392 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>150392).

La question était en l’espèce formulée en ces termes : « les dispositions de l’article L. 723-3 du code de la sécurité sociale, qui prévoient que, pour le financement des retraites de la profession, les avocats s’acquittent d’un droit fixe pour chaque affaire plaidée ou, pour les avocats dont l’activité principale n’est pas la plaidoirie, d’une contribution équivalente assise sur le chiffre d’affaires, en ce qu’elles ne permettent aucune péréquation en cas de paiement de droits de plaidoirie d’un montant plus élevé que la contribution qui aurait été due en l’absence de plaidoirie, portent-elles atteintes au principe d’égalité garanti par les articles 1er de la Constitution, 6 et 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ? ».

Après examen des différentes conditions requises par l’article 23-2 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, la Cour de cassation dit qu’il y a lieu à renvoi de la question au Conseil constitutionnel, au motif qu’elle présente « un caractère sérieux » : « les dispositions critiquées ayant pour objet de compléter le financement du régime d’assurance vieillesse de base des avocats gérés par la [CNBF], d’une part, par les droits alloués aux avocats pour la plaidoirie et ceux perçus par eux, au titre de leur activité propre comme de celle des salariés qu’ils emploient, d’autre part, par une contribution équivalente aux droits de la plaidoirie, déterminée en fonction de leurs revenus professionnels d’avocat complétés des rémunérations nettes versées aux avocats salariés dans la limite d’un plafond fixé par voie réglementaire, elle présente un caractère sérieux au regard du principe constitutionnel d’égalité devant la loi et les charges publiques en ce que ces dispositions prévoient un plafonnement des bases de calcul de cette contribution pour l’un des modes d’exercice de la profession d’avocat, mais non pour l’autre ».