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L’ouverture d’une liquidation judiciaire n’entraîne plus la résiliation du compte courant !

Procédant à un revirement de jurisprudence, la Cour de cassation juge, au sein de l’arrêt ici rapporté, que le compte courant étant un contrat en cours, sa résiliation ne peut résulter de l’ouverture de la liquidation judiciaire. La Haute juridiction en tire pour conséquence que puisque la clôture du compte n’intervient pas du fait de la survenance de la procédure collective, son solde ne devient pas exigible et, de fait, la caution ne peut en être tenue.

Le fait qu’une entreprise tombe dans les liens d’une procédure collective n’implique pas sa disparition du jour au lendemain de la scène juridique et économique !

Si ce qui précède est une évidence pour les amateurs de droit des entreprises en difficulté, l’exclamation montre surtout que, même dans les liens d’une procédure collective, il est crucial que le compte bancaire de la personne en difficulté ne soit pas clôturé en raison de la seule survenance de la procédure. En effet, il paraît bien inconcevable et contreproductif de priver le chef d’entreprise de tous ses moyens de paiement, d’encaissements et, plus généralement, d’accès à ses comptes.

À tout le moins, le propos ne souffre d’aucune discussion lorsque l’heure est au sauvetage de l’entreprise. En l’occurrence, en sauvegarde et en redressement judiciaire, la convention de compte courant peut être continuée, et ce, comme n’importe quel autre contrat en cours.

Reste qu’il faut toutefois adapter le régime particulier du compte courant aux exigences d’une procédure collective, puisque ce compte se caractérise par l’affectation de créances réciproques à un mécanisme de règlement instantané par fusion en un solde immédiatement disponible. Or, cet effet de règlement peut heurter le principe d’interdiction des paiements des créances antérieures. Par conséquent, si la convention de compte courant est bien continuée malgré l’ouverture d’une sauvegarde ou d’un redressement, un solde provisoire au jour du jugement d’ouverture doit néanmoins être déclaré au passif et un compte bis ouvert aux fins d’enregistrer les opérations postérieures à l’entrée dans la procédure collective.

Au-delà, qu’en est-il du sort d’une éventuelle caution qui se serait engagée à garantir le solde débiteur d’un compte courant lorsque la personne titulaire du compte fait l’objet d’une procédure de sauvetage ? La réponse à cette interrogation est très claire : tant que le compte est continué et ne fait l’objet d’aucune résiliation, la Cour de cassation considère que la caution n’est pas tenue de payer le solde provisoire existant au jour de l’ouverture de la procédure de sauvegarde ou de redressement, et ce, même si ce solde a été déclaré et admis au passif (Com. 16 déc. 2008, n° 07-21.764 NP).

Jusqu’à présent, la transposition de cette solution à la liquidation judiciaire posait certaines difficultés. Du reste, trancher le sort de la caution se révélait assez périlleux en l’absence de certitudes, même si, par un arrêt remarqué, la Cour de cassation avait lapidairement jugé que « le compte courant d’une société étant clôturé par l’effet de sa liquidation judiciaire, il en résulte que le solde de ce compte, est immédiatement exigible de la caution » (Com. 13 déc. 2016, n° 14-16.037 F-P+B, Dalloz actualité, 10 janv. 2017, obs. X. Delpech ; D. 2017. 5 ; ibid. 1996, obs. P. Crocq ; RTD civ. 2017. 196, obs. P. Crocq ; APC 2017, n° 30, note F. Petit ; RPC 2017. Comm. 27, note C. Gijsbers ; ibid. Comm. 64, note F. Reille ; BJE 2017. 105, note N. Borga ; LEDEN janv. 2017, p. 2, note P. Rubellin ; Gaz. Pal., 21 févr. 2017, n° 8, p. 32, note M.-P. Dumont-Lefrand).

L’emploi du passé est désormais de rigueur, car l’arrêt sous commentaire abandonne cette position et réalise, en quelque sorte, la transposition de la solution...

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