Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Article

Lorsque la police est présente, le citoyen reste à sa place

Le pouvoir de contrainte résultant de l’article 73 du code de procédure pénale, qui permet à toute personne d’appréhender l’auteur d’un crime ou d’un délit flagrant et le conduire devant l’officier de police judiciaire le plus proche, ne peut être régulièrement exercé lorsque l’arrestation peut être ou est réalisée par un agent des forces de l’ordre, en l’absence de réquisition de la part de ce dernier.

par David Pamart, Magistratle 10 juillet 2024

La chambre criminelle vient apporter un épilogue à ce qu’il était convenu d’appeler l’affaire Benalla, du nom d’un des protagonistes. Cette affaire ayant donné lieu à de nombreux comptes rendus médiatiques sur le déroulement des faits (P.-A. Souchard, Alexandre Benalla et Vincent Crase, des observateurs très engagés, Dalloz actualité, 27 sept. 2021 ; A. Bloch, Procès Benalla : « C’est la chronique d’une sortie de route annoncée », Dalloz actualité, 1er oct. 2021 ; A. Bloch, Délibéré Benalla : « Des comportements inadmissibles et insupportables au corps social », Dalloz actualité, 5 nov. 2021), nous rappellerons simplement, pour mémoire, que M. Benalla, alors chargé de mission à la présidence de la République, et M. Crase, un de ses amis agent de sécurité, avaient été invités à participer comme observateurs à une opération de maintien de l’ordre le 1er mai 2018 à Paris. À cette occasion, il leur était reproché de s’être immiscés dans une fonction publique en se substituant aux forces de sécurité ou en les secondant pour appréhender des personnes participant à la manifestation.

Jugés notamment pour des faits de violences en réunion et d’immixtion dans une fonction publique, les deux prévenus étaient déclarés coupables par le tribunal correctionnel puis la cour d’appel et condamnés à la peine de trois ans d’emprisonnement, dont deux avec sursis concernant M. Benalla et de deux ans avec sursis concernant M. Crase.

Ils formèrent un pourvoi en cassation soutenant que l’autorisation donnée, par l’article 73 du code de procédure pénale, à chaque citoyen d’appréhender les auteurs d’une infraction flagrante les exonérait des délits qui leur étaient reprochés.

L’article 433-12 du code pénal réprime l’immixtion dans une fonction publique lorsque quelqu’un accomplit, en connaissance de cause, un acte réservé à cette fonction. En l’espèce, il n’était factuellement pas contesté, ni contestable au vu des images vidéo, que les deux prévenus aient participé d’initiative à différentes interpellations et aient eu des gestes violents pour contraindre des personnes interpellées. Le pourvoi permettait de s’interroger sur l’articulation entre pouvoir d’appréhension octroyé par l’article 73 et délit d’immixtion dans une fonction publique.

Les termes de l’autorisation légale

L’arrestation en flagrant délit d’un délinquant est un devoir pour les membres des forces de l’ordre, délégataires d’une parcelle de la souveraineté nationale, en raison de la charge dont ils sont investis. Ce devoir incombait également à tout citoyen sous l’empire du code d’instruction criminelle (C. instr. crim., art. 106). Lors de l’adoption du code de procédure pénale, ce devoir a muté en simple possibilité pour chaque citoyen.

Aux termes de l’article 73 du code de procédure pénale, toute personne peut donc devenir ce que la jurisprudence administrative...

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :