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Article
Les modalités du contrôle judiciaire sont soumises au contrôle de proportionnalité
Les modalités du contrôle judiciaire sont soumises au contrôle de proportionnalité
L’ordonnance de modification du contrôle judiciaire interdisant à la personne mise en examen toute apparition et représentation publiques dans le cadre de son activité artistique ainsi que toute activité impliquant un contact avec des mineurs, constitue une ingérence dans sa liberté d’expression mais n’encourt pas la censure si les conditions posées par le paragraphe 2 de l’article 10 de la Convention européenne sont remplies et que l’ingérence est proportionnée.
Le contrôle de proportionnalité, aussi diversifié qu’il puisse être tant dans ses formes que dans ses manifestations, s’illustre essentiellement en matière pénale dans le cadre de la protection des droits fondamentaux eu égard aux mesures prononcées. En effet, lorsque la chambre criminelle connaît de l’ingérence d’une mesure (et plus habituellement d’une sanction) dans un droit ou une liberté fondamentale, celle-ci s’assure que l’atteinte est proportionnée et, pour ce faire, recourt régulièrement à la motivation enrichie. La décision du 21 février 2023 relative aux interdictions prononcées dans le cadre du contrôle judiciaire livre une nouvelle illustration de l’expansion de ce contrôle de proportionnalité.
L’intéressé a été mis en examen des chefs de viol et agression sexuelle aggravés, abus de faiblesse, et corruption de mineur et placé en détention provisoire. Quelques mois plus tard, il a été mis en liberté sous contrôle judiciaire. Le juge d’instruction a par la suite modifié cette mesure en y ajoutant notamment les interdictions de toute apparition et représentation publiques dans le cadre de son activité artistique de chanteur ainsi que de toute activité impliquant un contact avec des mineurs.
Le mis en examen a relevé appel de cette ordonnance de modification mais la chambre de l’instruction l’a confirmée en écartant le moyen tiré de l’atteinte disproportionnée à la liberté d’expression. Pour les juges du fond, l’argument était inopérant en ce que l’intéressé avait été mis en examen pour des infractions à caractère sexuel et présentait un risque de renouvellement des faits.
Le requérant s’est alors pourvu en cassation afin de contester l’arrêt rendu par la chambre de l’instruction qui n’avait pas procédé au contrôle de la proportionnalité de la mesure au regard des atteintes qu’elle porte à la liberté d’expression artistique ainsi qu’à la liberté individuelle et au droit au travail, alors qu’il en avait fait la demande.
Si la chambre criminelle reconnaît que les juges du fond auraient dû examiner, comme les y invitait le mémoire, si les interdictions contestées constituaient une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression du mis en examen, l’arrêt n’encourt pas la censure dès lors que la mesure répondait aux conditions posées par le second paragraphe de l’article 10 de la Convention européenne.
Une ingérence conditionnée dans la liberté d’expression
Le droit à la liberté d’expression n’est pas absolu, il ne figure pas au rang des droits intangibles à l’égard desquels la Cour européenne des droits de l’homme n’admet aucune dérogation. Certaines ingérences y sont ainsi tolérées dès lors qu’elles répondent aux conditions posées par l’alinéa 2 de l’article 10 de la Convention européenne.
En l’espèce, la chambre criminelle a reconnu que l’interdiction faite à une personne mise en examen dans le cadre d’un contrôle judiciaire de se livrer à tout ou partie de son activité professionnelle d’artiste, en application de l’article 138, 12° et 12° bis, du code de procédure pénale, constitue une ingérence dans sa liberté d’expression et entre dès lors dans le champ de l’article 10 de la Convention européenne. Toutefois, elle a relevé que les conditions posées par le paragraphe 2 de l’article 10 précité étaient remplies.
En effet, la chambre criminelle a d’abord relevé que le prononcé de ces interdictions constituait bien une restriction prévue par la loi, en ce que l’article 138, 12°, du code de procédure pénale prévoit la possibilité, dans le cadre d’un contrôle judiciaire, de prononcer l’interdiction de se livrer à « certaines activités de nature professionnelle ou sociale, à l’exclusion de...
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