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Nouvelle circulaire de politique pénale d’Éric Dupond-Moretti

Si les priorités dégagées sont proches de la circulaire de 2020 (Dalloz actualité, 6 oct. 2020, obs. M. B.), Éric Dupond-Moretti insiste sur des points nouveaux. Il y annonce également quelques réformes et circulaires à venir sur des sujets aussi divers que la délinquance du quotidien, la délinquance cyber et environnementale, la régulation carcérale ou l’aide aux victimes.

par Pierre Januel, Journalistele 23 septembre 2022

En introduction, le garde des Sceaux rappelle les réformes passées et celles à venir. Il indique notamment que la procédure pénale « doit être réécrite » pour redevenir une « référence » : « les capacités d’enquête doivent être renforcées et fluidifiées, les phases contradictoires et accusatoires repensées, la place des victimes redéfinie, les délais de traitement des procédures réduits et les décisions rendues exécutées sans délai ».

Une justice pivot dans la lutte contre la délinquance du quotidien

La première partie de la circulaire est consacrée à la délinquance du quotidien, Éric Dupond-Moretti veut renforcer les échanges entre parquets et élus. Des outils actualisés seront adressés prochainement par la Direction des affaires criminelles et des grâces (DACG). Le garde des Sceaux rappelle la nécessité de lutter contre les atteintes aux forces de l’ordre, aux élus et les rodéos motorisés. Sur ce sujet, « une circulaire établie en lien avec la délégation à la sécurité routière » sera diffusée début 2023.

Sur la criminalité organisée, la circulaire souligne le déploiement prochain du logiciel SIROCCO « destiné à favoriser le partage d’informations et recoupements entre procédures ». Le ministre insiste sur deux axes : la lutte contre le trafic de stupéfiants et une politique dynamique de saisies et de confiscations. Le ministre appelle au renforcement des liens entretenus avec le fisc, TRACFIN et les autorités de contrôle des professionnels assujettis (notaires, commissaires de justice…). La circulaire encourage les affectations à des ONG ou aux services judiciaires.

Des développements sont consacrés aux violences intrafamiliales. Concernant les féminicides, le ministre souhaite des retours d’expérience (RETEX) plus fréquents et une information systématique de la DACG des homicides et tentatives d’homicides conjugaux. Sur les enfants, de nouvelles instructions générales seront prochainement adressées, pour renforcer les circuits d’information entre les différents acteurs. Une insistance nouvelle est également mise sur la lutte contre la prostitution des mineurs.

Sur les violences sexuelles, « une vigilance forte s’impose dans le traitement des procédures ouvertes, spécialement lorsque les faits ont été commis dans un cadre professionnel, scolaire ou universitaire, ou motivés par des considérations sexistes ou à raison de l’orientation sexuelle ». Pour le ministre, « ces faits justifient la mise en œuvre d’actions ciblées d’identification des victimes et le déploiement de moyens d’investigation dédiés. »

Justice environnementale et cybercriminalité

Absente de la circulaire de 2020, une insistance particulière est mise sur la délinquance environnementale : « la rationalité économique doit s’inverser, et le coût d’un comportement négligent, voire sciemment attentatoire à la préservation de nos ressources et de notre patrimoine naturel, doit devenir prohibitif ». Une circulaire sera adressée dans les prochaines mois pour accompagner la « judiciarisation attendue et le maniement de nouveaux outils de pilotage et de traitement ».

Autres ajouts par rapport à 2020 : l’immigration irrégulière et la cybercriminalité. Le garde des Sceaux souhaite développer l’action des cyber-référents et la DACG diffusera prochainement de nouveaux outils opérationnels dédiés à l’appréhension des phénomènes cybercriminels. Le ministre annonce aussi qu’une circulaire dédiée au traitement des atteintes à la probité sera adressée début 2023.

Politique des peines

Pour les auteurs de faits graves ou réitérants, le ministre souhaite que les délais de jugement ne soient pas supérieurs à hui mois. Sur les peines, le ministre souhaite que les parquets soient « particulièrement attentifs à requérir des interdictions de paraître en certains lieux » et à en informer les maires concernés.

Le ministre rappelle la situation critique des prisons. Les parquets doivent veiller « à la stricte nécessité de la détention provisoire, en privilégiant les mesures d’ARSE et d’ARSEM y compris sur défèrement ». Il note et regrette une baisse du prononcé du travail d’intérêt général (TIG) comme obligation particulière du sursis probatoire a été constatée depuis 2019.

Sur la régulation carcérale, le ministre appelle à de « véritables politiques de juridiction ». Il convient « d’institutionnaliser, au moins tous les semestres, un dialogue étroit entre l’autorité judiciaire, siège et parquet réunis, les auxiliaires de justice, les services déconcentrés de l’administration pénitentiaire et les partenaires associés ».

Victimes : une extension de la CIVI

Le quatrième axe de la circulaire concerne les victimes. Le ministre souhaite « une attention toute particulière à l’information portée aux victimes sur les suites données à leurs plaintes, ou sur le parcours de peine des auteurs ». Le ministre annonce également que pour garantir une meilleure réparation des préjudices, il portera « prochainement une proposition d’extension du champ couvert par la CIVI ».

Enfin, Éric Dupond-Moretti souhaite que les parquets communiquent davantage encore notamment « sur les procédures individuelles qu’ils traitent ».