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Absence de mise en place d’IRP et défaut de PV de carence : indemnisation non subordonnée à la preuve d’un préjudice
Absence de mise en place d’IRP et défaut de PV de carence : indemnisation non subordonnée à la preuve d’un préjudice
Il résulte des articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail, dans leur rédaction applicable en la cause, que lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement ne caractérisent pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient à l’employeur de démontrer que la rupture du contrat de travail ne constitue pas une mesure de rétorsion à la demande antérieure du salarié d’organiser des élections professionnelles au sein de l’entreprise.
Lorsque l’employeur ne démontre pas avoir mis en place d’instances représentatives du personnel ou avoir établi de procès-verbal de carence à la suite d’une demande d’organisation des élections professionnelles par un salarié, alors il commet une faute caractérisant un préjudice sans qu’il soit nécessaire de le prouver.
par Sébastien Demay, Docteur en droit privéle 11 septembre 2023
Dès lors que le seuil de onze salariés est atteint, il incombe à l’employeur d’organiser les élections professionnelles (C. trav., art. L. 2314-4). En l’absence d’initiative de la part de ce dernier, un syndicat ou un salarié peut en faire la demande et l’employeur a pour obligation d’engager la procédure des élections dans le mois suivant la réception de cette demande (C. trav., art. L. 2314-8). Il est courant que, dans les structures de moins de cinquante salariés, les élections n’aient pas été, volontairement ou involontairement, organisées. La question posée à la Cour de cassation dans l’arrêt du 28 juin 2023 est de savoir quelle est la protection accordée au salarié qui demande l’organisation des élections professionnelles.
Dans la présente affaire, le salarié a demandé à son employeur d’organiser des élections professionnelles au sein de l’entreprise le 9 octobre 2015. À la suite de cette sollicitation, une procédure disciplinaire a été engagée à compter du 14 octobre 2014, date à laquelle la demande aurait été reçue par l’employeur. Le salarié a ensuite été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé le 5 novembre 2015. Le 9 novembre 2015 ce dernier est licencié pour faute grave qu’il conteste immédiatement en sollicitant sa nullité pour discrimination syndicale et la réparation du préjudice pour défaut de représentation du personnel.
Sur la protection du salarié sollicitant l’organisation des élections professionnelles
Le code du travail protège, spécialement, le salarié qui sollicite l’organisation des élections professionnelles dans l’entreprise. Aux termes de l’article L. 2411-6 du code du travail, « l’autorisation de licenciement est requise, pendant une durée de six mois, pour le salarié ayant demandé à l’employeur d’organiser les élections au comité social et économique ou d’accepter d’organiser ces élections. Cette durée court à compter de l’envoi à l’employeur de la lettre recommandée par laquelle une organisation syndicale a, la première, demandé ou accepté qu’il soit procédé à des élections. Cette protection ne bénéficie qu’à un seul salarié par organisation syndicale ainsi qu’au premier salarié, non mandaté par une organisation syndicale, qui a demandé l’organisation des élections ». La Cour de cassation en déduit que la protection spéciale du salarié « ne court qu’à compter de l’intervention effective aux mêmes fins par une organisation syndicale » (Crim. 10 déc. 1985, Juri-social 1986, F17), sous réserve que cette organisation syndicale remplisse « les conditions pour négocier le protocole électoral et présenter des candidats au premier tour des élections » (Soc. 15 oct. 2015, n° 14-15.995, RJS 1/2016, n°43). A contrario, le salarié qui demande seul l’organisation des élections professionnelles n’est pas spécialement protégé, ce qui est source d’une inégalité de traitement importante qui serait justifiée par le fait de vouloir éviter des comportements opportunistes de salariés se sentant menacé d’un licenciement.
Il n’en demeure pas moins que le salarié, même seul, exerce sa liberté fondamentale d’expression en demandant le respect d’un droit fondamental. C’est donc sur le terrain du principe de non-discrimination, prévu à l’article L. 1132-1 du code du travail, notamment en matière syndicale, mais aussi à l’article L. 2141-5 du code du travail que la protection peut être accordée. Selon ce dernier texte, « il est interdit à l’employeur de prendre en considération l’activité syndicale pour arrêter ses décisions notamment de recrutement, de conduite et répartition de travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail ». En l’espèce, le salarié, non soutenu par une organisation syndicale, estimait être discriminé et que, de fait, son licenciement devait être jugé nul. La Cour de cassation lui donne raison en posant le principe suivant : « lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement ne caractérisent pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient à l’employeur de démontrer que la rupture du contrat de travail ne constitue pas une mesure de rétorsion à la demande antérieure du salarié d’organiser des élections professionnelles au sein...
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