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Une date pré-imprimée sur le support utilisé par le testateur pour rédiger son testament olographe peut constituer un élément intrinsèque à celui-ci permettant d’établir une période déterminée et ainsi le sauver de la nullité.
par Quentin Guiguet-Schielé, Maître de conférences, Université Toulouse 1 Capitolele 5 décembre 2023
Tout testament porte en lui une précieuse illusion d’immortalité, disait le doyen Carbonnier. À lire l’arrêt rendu ce 22 novembre 2023 par la Cour de cassation, l’immortalité de la volonté posthume se double d’une robustesse à toute épreuve.
Une femme décéda le 7 octobre 2015 en laissant deux frères, dont l’un se prétendit légataire universel en considération d’un document manuscrit rédigé par la défunte au verso d’un relevé de compte bancaire. Le frère exhérédé contesta la validité de ce document sur le fondement de l’article 970 du code civil qui exige trois conditions de forme pour la validité des testaments olographes : une rédaction manuscrite, une date et une signature. Ici le document litigieux n’était pas daté de la main de la testatrice. La nullité semblait donc inévitable. Cependant le recto de la feuille contenait une date imprimée : le relevé bancaire renseignait sur la valorisation d’une épargne à la date du 31 mars 2014.
Le jugement de première instance et la Cour d’appel de Paris admirent la validité du testament olographe, au motif que la date pré-imprimée au recto suffisait à établir que le testament avait été rédigé au cours d’une période déterminée et que le demandeur n’établissait pas l’incapacité de la testatrice ni la rédaction d’un testament révocatoire au cours de cette période.
Selon le moyen du pourvoi une date pré-imprimée ne peut être vue comme un élément intrinsèque et il n’existait de toutes manières aucun élément extrinsèque complémentaire. En creux, la question posée était la suivante : la date pré-imprimée peut-elle suffire à sauver le testament olographe dépourvu de date manuscrite ?
Oui, répond la Cour de cassation qui rejette le pourvoi non sans énoncer en attendu de principe qu’« en dépit de son absence de date, un testament olographe n’encourt pas la nullité dès lors que des éléments intrinsèques à l’acte, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, établissent qu’il a été rédigé au cours d’une période déterminée et qu’il n’est pas démontré qu’au cours de cette période, le testateur ait été frappé d’une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible » (§ 7).
La Cour ajoute qu’« une date pré-imprimée sur le support utilisé par le testateur pour rédiger son testament olographe peut constituer un élément intrinsèque à celui-ci » (§ 8). Ici, la date du 31 mars 2014 marquait le point de départ de la période car telle était la mention imprimée au recto et que la testatrice avait indiqué son domicile dans le document au verso. Le 27 mai 2014 constituait le terme de la période puisque l’intéressée avait été hospitalisée ce jour-là et jusqu’à son décès. Le testament aurait donc nécessairement été rédigé entre ces deux dates et rien n’établissait dans cet intervalle l’incapacité ou la révocation.
La décision, résolument permissive,...
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