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Injure et provocation publique à la discrimination : conditions pour se constituer partie civile

L’impossibilité pour la personne qui s’estime attaquée à raison de sa religion, alors qu’elle n’est pas personnellement et directement visée par les propos ou dessins, de mettre en mouvement l’action publique pour provocation publique à la discrimination et injure publique aggravée est justifiée par la nécessité de limiter les atteintes à la liberté d’expression et ne porte pas atteinte au droit à un procès équitable. 

Pour marquer l’ouverture du procès des attentats de janvier 2015, Charlie Hebdo republia, le 2 septembre 2020, les caricatures du prophète Mohammed. S’estimant lésé, un particulier de confession musulmane fit citer devant le tribunal correctionnel le directeur de la publication comme auteur, et la société éditrice en qualité de civilement responsable, pour injure publique et provocation à la haine en raison de l’origine, l’ethnie, la race ou la religion. Le 24 décembre 2021, le tribunal correctionnel le déclara irrecevable au motif que les propos et les dessins poursuivis ne le visaient pas personnellement. La Cour d’appel de Paris confirma ce jugement par un arrêt du 9 février 2023.

À l’occasion de son pourvoi, l’individu se prétendant victime posa une question prioritaire de constitutionnalité interrogeant la conformité au droit à un procès équitable, au droit à un recours effectif et au principe d’égalité devant la loi des dispositions combinées des articles 33, alinéa 3, 24, alinéa 7, 47, 48 et 48-1, alinéas 1er et 2, de la loi du 29 juillet 1881, et des articles 2, 2-1, alinéas 1er et 2, et 3 du code de procédure pénale, qui excluent la possibilité pour la victime de se constituer partie civile pour injure publique à raison de sa religion lorsqu’elle n’est pas nommément visée, ou pour provocation publique à la haine à raison de son appartenance à une religion, cette possibilité étant réservée aux associations habilitées ou au ministère public.

La Cour de cassation décida de ne pas renvoyer la question posée par un arrêt non publié du 5 septembre 2023 (Crim., QPC, 5 sept. 2023, n° 23-81.316 F-D, D. 2024. 136, obs. E. Dreyer ; Légipresse 2023. 527 et les obs. ; ibid. 2024. 125, obs. N. Verly ).

Par le présent arrêt, la chambre criminelle reprend l’essentiel des motifs du non-renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité pour rejeter le pourvoi qui dénonçait une atteinte excessive au droit à un procès équitable et au droit à un recours effectif. La Haute cour rappelle ainsi...

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