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Plus de souplesse pour les gestionnaires publics

La principale annonce nouvelle du deuxième comité interministériel de la transformation publique concerne un allégement des contrôles financiers préalables sur les gestionnaires publics. Ce qui devrait entraîner une réforme des conditions d’engagement de la responsabilité des comptables publics.

par Marie-Christine de Monteclerle 31 octobre 2018

Des services publics plus proches des citoyens, un État plus transparent, plus souple, plus agile… Telle est la vision que le gouvernement a défendue lors du deuxième comité interministériel de la transformation publique (CITP), le 29 octobre. Ce CITP visait à la fois à présenter la stratégie globale de la transformation de l’action publique et les plans de transformation des ministères (V. encadré).

Les annonces les plus nouvelles concernent l’allégement des contraintes de la gestion publique. Le maître mot, explique-t-on à Matignon, c’est le contrat, « la logique de projet contractualisé ». Ainsi, le contrôle budgétaire devrait être internalisé auprès des gestionnaires, le contrôleur budgétaire devenant conseil et contrôleur de gestion. Cette évolution entraînera l’ouverture d’une réflexion sur la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public pour « éviter les surcontrôles et mieux responsabiliser l’ensemble des acteurs de la chaîne financière dans l’État, les collectivités territoriales et les opérateurs ». Pour les opérateurs et les administrations de réseau, le contrat devrait être pluriannuel pour leur garantir une visibilité.

Rémunération liée à la performance

Ces nouveaux gestionnaires publics devraient également disposer de plus larges marges de manœuvre en matière de ressources humaines, notamment pour recruter des contractuels, rémunérer les agents au mérite et piloter par la masse salariale avec la suppression des schémas d’emplois. En contrepartie de cette plus grande liberté, ces nouveaux managers publics verront une part plus importante de leur rémunération liée à leur performance.

Les projets de l’exécutif en matière de fonction publique n’ont pas été réellement précisés au cours du deuxième CITP, le gouvernement renvoyant à la concertation en cours sur le dialogue social, les rémunérations, le recours au contrat et la mobilité et au projet de loi annoncé au premier semestre 2019. Un certain nombre d’annonces pourraient intervenir le 12 décembre, lors d’une réunion des principaux cadres de l’État autour du président de la République et du Premier ministre. Le deuxième CITP a toutefois acté la création d’une « fonction » – qui pourrait devenir une agence – dédiée à la reconversion et à la mobilité des agents de l’État. Un fonds de 50 M€ par an est prévu pour accompagner ces transformations ainsi que de nouveaux dispositifs indemnitaires pour accompagner les restructurations. Une autre création devrait avoir lieu en novembre, celle de l’Université de la transformation publique, qui aura pour mission d’accompagner les agents, les managers et les chefs de projets dans l’acquisition des savoir-faire et savoir-être nécessaires à la réussite de leurs projets de changements

Celles-ci seront notamment liées à la réorganisation de l’administration territoriale. Sur ce point, le Premier ministre, dans un discours devant les directeurs d’administration centrale à l’issue du CITP, a indiqué que le gouvernement était en train d’examiner les propositions des préfets, « avec le souci d’éviter le biais de reconcentrations régionales ». Les décisions seront annoncées avant la fin de l’année.

Un État à la fois stratège et de proximité

Dans son intervention, Édouard Philippe a insisté sur l’attente des Français à l’égard de la transformation publique. « Ils veulent, a-t-il affirmé, un État à la fois stratège et de proximité ». C’est pourquoi le programme de transformation de l’action publique  vise en même temps à ce que l’État se recentre sur les priorités mais aussi à ce que les services publics soient plus proches des usagers. Pour ce faire, le gouvernement veut développer les accueils communs et mutualisés où des agents plus polyvalents seront capables d’accompagner les usagers dans la plupart de leurs démarches administratives. Le numérique est également un outil privilégié de la simplification de l’accès aux services publics. Le gouvernement confirme sa volonté de l’accessibilité en ligne 100 % des services publics en 2022. En 2019, c’est l’inscription en ligne sur les listes électorales qui sera généralisée.

Les citoyens vont être aussi mieux informés de la qualité et des résultats des services publics. À la fin de l’année, une première vague d’indicateurs de qualité sera publiée, concernant les services des impôts aux particuliers, des tribunaux de grande instance, des caisses de sécurité sociale, des préfectures, des commissariats, des gendarmeries et des consulats. En 2019, ce sont les douanes, les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), le casier judiciaire national, un panel de collèges et de lycées ainsi que de maisons départementales des personnes handicapées qui devront afficher leurs résultats. En 2019, sera mis en place un site, Vox usagers, permettant aux citoyens de faire part de leur expérience dans leurs relations avec les services publics.

Peu de surprises dans les plans de transformation ministériels

Les plans de transformation ministériels rendus publics à l’occasion du CITP comportent, pour l’essentiel, des mesures largement connues. La plupart proclament l’intention de faire voter et/ou de mettre en oeuvre les lois dont chaque département est porteur (projet de loi de programmation et de réforme de la justice pour la chancellerie, loi ELAN pour la cohésion des territoires, loi de programmation militaire pour les armées…). Ou encore de mener à bien des programmes en cours (plan climat et feuille de route pour l’économie circulaire pour la transition écologique et solidaire ; transformation du système de santé et lutte contre la pauvreté pour le ministère des solidarités et de la santé…). En matière d’organisation, les ministères annoncent vouloir déconcentrer et réorganiser leurs administrations centrales et territoriales, mais sans donner davantage de détails. Et de mauvais esprits pourraient s’interroger sur le caractère réellement novateur de l’intention affichée par le ministère de l’intérieur de « lutter efficacement contre le terrorisme » et de « faire reculer l’insécurité au quotidien »…