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Prud’hommes : le collaborateur d’un avocat aux conseils demande la requalification de son contrat

Pour la première fois, le conseil de prud’hommes de Paris devra déterminer s’il est compétent à connaître d’une demande en requalification d’un avocat collaborateur inscrit à la cour mais exerçant au sein d’un cabinet d’avocats aux conseils. 

par Thomas Coustetle 9 novembre 2017

L’article 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 qui organise la profession d’avocat énonce, en des termes qui semblaient laisser peu de place à la discussion, que « l’avocat exerce en qualité de salarié ou de collaborateur d’un avocat […]. Les litiges nés à l’occasion d’une rupture d’un contrat de collaboration sont soumis à l’arbitrage du bâtonnier ». Seulement voilà, en l’espèce, l’employeur n’est pas un avocat à la cour mais plaide devant le Conseil d’État et la Cour de cassation. 

L’action en requalification de l’avocat collaborateur relève-t-elle de la compétence du juge du travail ? Sur le plan juridique, la question est inédite. Hier, les deux parties se sont énergiquement employées à dérouler leurs arguments lors de l’audience en départage du conseil de prud’hommes de Paris. Pour l’occasion, seule la présidente a siégé.

Les arguments étaient affutés. L’avocat du cabinet, Me Jean Néret, a plaidé le premier. « Un avocat à la cour ne peut être salarié d’un officier ministériel », a-t-il affirmé. Il s’est fondé sur ce même article 7 de la loi de 1971, « siège de la matière » : « on ne peut exercer une activité d’avocat salarié qu’entre avocats à la cour », au sens de ce texte. « Les cabinets d’avocats aux conseils n’exercent pas la même profession, ce sont des officiers ministériels », a-t-il ajouté. Ils tiennent, en effet, cet héritage d’une ordonnance royale du 10 septembre 1817 encore en vigueur.

En renfort, le praticien a cité une unique décision mais qui fait déjà figure de précédent tout indiqué. Il s’agit de l’arrêt de la chambre sociale du 16 septembre 2015 (v. Dalloz actualité, 21 sept. 2015, art. A. Portmann isset(node/174535) ? node/174535 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>174535). La décision tranche une situation voisine, à l’égard cette fois d’un avocat et d’un avoué qui, avant la disparition de la profession au 1er janvier 2012, était également officier ministériel. Or la Cour de cassation avait décliné la compétence prud’homale au profit du bâtonnier. La cour d’appel de renvoi, dans sa décision du 24 janvier 2017 statuant au fond, s’était chargée de rejeter l’action en requalification (v. Dalloz actualité, 27 janv. 2017, art. A. Portmann isset(node/183024) ? node/183024 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>183024).

En défense, l’avocat du collaborateur, Me Kevin Mention, a été pressé par l’insistance de la présidente à « répondre sur la compétence et sur l’arrêt de la Cour de cassation ». Il a tenté de placer le débat sur les éventuelles incohérences liées au statut : « Les cabinets d’avocats aux conseils n’ont même pas le même ordre, pas le même bâtonnier ». « Devant quel bâtonnier l’affaire sera renvoyée le cas échéant ? », a-t-il interrogé.

La décision sera rendue le 8 décembre prochain.