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Rupture brutale d’une relation commerciale établie : le juge n’a pas à expliquer en quoi le délai préavis permet à la victime de retrouver des débouchés

Le délai de préavis, servant de base au calcul de l’indemnité pour rupture brutale d’une relation commerciale établie, est déterminé par référence à la durée de la relation. D’autres critères peuvent être mobilisés. Le juge n’a toutefois pas l’obligation d’expliquer en quoi le délai de préavis aurait permis à la victime de trouver des débouchés. L’appréciation du préavis est souveraine.

Le contentieux de la rupture brutale des relations commerciales établies revient – encore et encore – sur le devant de la scène. Le dispositif est bien connu : une relation commerciale établie ne peut pas être rompue brutalement, c’est-à-dire sans préavis suffisant, sous peine, pour l’auteur, d’engager sa responsabilité (C. com., art. L. 442-1, II ; anc. art. L. 442-6, I, 5°). Ce dispositif soulève toutefois de nombreuses interrogations : juridictions spécialisées (v. le récent revirement de l’arrêt Aimargali, Com. 18 oct. 2023, n° 21-15.378, Dalloz actualité, 7 et 8 nov. 2023, note M. Barba), champ d’application, durée du préavis, préjudice indemnisé… tout ou presque est sujet à discussion (M.-A. Frison-Roche et J.-C. Roda, Droit de la concurrence, 2e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2022, §§ 829 s.). L’arrêt commenté concerne spécifiquement la durée de préavis, dont l’appréciation a une incidence directe sur l’indemnisation de la victime.

Tout part d’une affaire parfaitement classique. En 2014, un prestataire (la société WMG) conclut un contrat d’un an avec une banque (la BNP). En 2015, un second contrat, également d’une durée d’un an, est conclu. En 2016, la BNP décide de ne plus faire appel au prestataire. Le prestataire déçu invoque alors le dispositif de la rupture brutale à l’encontre de la banque.

Jugeant que la somme de 25 000 € obtenue en appel (Paris, 22 juin 2022, n° 20/17215) est insuffisante, le prestataire victime se pourvoi en cassation. Le pourvoi est rejeté. La motivation développée par la Cour de cassation est toutefois intéressante à plus d’un titre. Détaillons quatre points.

Une relation commerciale peut être établie par la succession de deux contrats d’un an

Le pourvoi ne contestait pas le caractère établi de la relation commerciale. Il ne faut pas s’en étonner : le pourvoi était formé par la victime indemnisée, critiquer le caractère établi de la relation serait donc allé contre ses intérêts. Remarquons toutefois que la relation commerciale a, en l’espèce, été...

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