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Saisie pénale spéciale : précisions sur le contrôle de la proportionnalité de la mesure au regard du droit de propriété

La chambre de l’instruction qui a apprécié le caractère nécessaire et proportionné de l’atteinte portée par la saisie au droit au respect des biens d’une société, au regard de sa situation personnelle et de la gravité concrète des faits, a bien respecté les dispositions de l’article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme, 706-150 du code de procédure pénale et 131-21 du code pénal. 

par Sofian Goudjille 2 septembre 2020

Historiquement, la saisie pénale a été conçue comme une mesure utile à la manifestation de la vérité.

Seulement, avec la loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale, le législateur a considérablement élargi, dès le stade de l’enquête et de l’instruction, les possibilités de saisie patrimoniale. Il s’agissait alors de « garantir l’exécution de la peine complémentaire de confiscation légalement prévue » (S. Guinchard et J. Buisson, Procédure pénale, 12e éd., Lexisnexis, 2019, n° 886), en aménageant notamment des saisies spéciales : saisies de patrimoine (C. pr. pén., art. 706-148), saisies immobilières (C. pr. pén., art. 706-150), saisies portant sur certains biens ou droits immobiliers incorporels (C. pr. pén., art. 706-153), saisies sans dépossession (C. pr. pén., art. 756-158).

Face à ce mouvement d’expansion du domaine des saisies pénales, « les avocats et conseils ont redoublé d’imagination dans leurs recours en contestation, jouant avec divers fondements juridiques, parmi lesquels on retrouve le principe de proportionnalité » (H. Diaz, Saisie spéciale : précisions sur le contrôle de proportionnalité, obs. ss. Crim. 4 mars 2020, F-P+B+I, n° 19-81.818, Dalloz actualité, 29 avr. 2020). C’est ce fondement que l’on retrouve invoqué dans le présent arrêt.

En l’espèce, une société exploitant une galerie d’art dans un hôtel particulier situé à Paris, a été, dans le cadre d’une information judiciaire, mise en cause pour avoir vendu à des collectionneurs plusieurs pièces qui n’étaient pas authentiques mais pourtant présentées comme ayant été fabriquées au cours du dernier quart du XXe siècle.

Le directeur général de la société ainsi que son administrateur ont été mis en examen. Par la suite, le juge d’instruction a, par une ordonnance en date du 6 juillet 2017, ordonné la saisie de l’hôtel particulier et de ses annexes, à titre d’instrument du délit de tromperie sur les qualités substantielles.

Un appel a été interjeté par la société.

La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris a confirmé l’ordonnance de saisie pénale des différents biens après avoir relevé qu’au regard de l’article 706-147 du code de procédure pénale, lequel écarte expressément le jeu des nullités liées à la procédure de faillite, il y avait lieu de constater que l’ordonnance de saisie prise par le juge d’instruction postérieurement à l’ouverture de la procédure de sauvegarde ne saurait être annulée pour violation de l’ordre public de la faillite.

L’arrêt relève en outre que c’est par des motifs pertinents que le juge...

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