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Expatrié et faute inexcusable : retour au droit commun de la responsabilité contractuelle

Le salarié expatrié dont l’action en reconnaissance de faute inexcusable a été déclarée irrecevable par les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale peut demander réparation des conséquences de l’affection qui n’est pas prise en charge au titre de la législation sur les accidents du travail ou les maladies professionnelles, en engageant une action contre son employeur sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile contractuelle.

par J. Sirole 20 décembre 2011

Une salariée expatriée en Côte-d’Ivoire a été victime d’une agression en dehors du temps et du lieu de travail. Elle n’était pas affiliée à la sécurité sociale française mais au régime local de sécurité sociale et avait choisi de s’assurer volontairement à titre complémentaire contre les risques d’accidents du travail et de maladie professionnelle auprès de la Caisse des Français de l’étranger (CFE), conformément aux dispositions de l’article L. 762-1 du code de la sécurité sociale. La salariée a déclaré cet incident en tant qu’accident du travail, qualification reconnue par la CFE. Elle a alors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) afin de voir reconnaître l’existence d’une faute inexcusable de son employeur. Mais sa demande est finalement déclarée irrecevable car elle n’est pas liée à son employeur mais uniquement à la CFE pour la prise en charge de ses arrêts de travail et des préjudices subséquents à hauteur des termes d’engagement de son assurance volontaire, et le juge du fond de souligner que les cotisations d’accident du travail sont à sa seule charge et n’incombent en aucun cas à l’employeur. La cour d’appel conclut qu’en raison de l’inexistence d’une assurance obligatoire d’accident du travail pour les salariés expatriés, la faute inexcusable de l’employeur ne saurait avoir un impact particulier sur cette prise en charge (Montpellier, 4e ch. soc., n° RG 06/06994, 18 avr. 2007 ; Sem. soc. Lamy 2007, n° 1326, p. 11, obs. Bossy et Albrieux Vuarchex). La salariée décide alors d’obtenir réparation de son dommage devant la juridiction prud’homale. La cour d’appel condamne finalement l’employeur à payer une somme à titre de dommages et intérêts du fait des conséquences de l’agression. La question posée à la Cour porte sur le fait de savoir si, à défaut de pouvoir faire reconnaître l’existence d’une faute inexcusable, le salarié a la possibilité de recourir au droit commun de la responsabilité contractuelle. Par la présente décision, la Cour répond par l’affirmative et rejette le pourvoi. C’est, à notre connaissance, la première fois que la chambre sociale a l’occasion de se prononcer sur cette question.

Depuis le compromis réalisé par la loi du 9 avril 1998, outre le caractère forfaitaire de l’indemnisation des affections d’origine professionnelle en contrepartie de l’automaticité de leur réparation, l’employeur jouit en principe d’une immunité contre toute action en responsabilité sur le terrain du droit commun, dès lors que s’applique la législation sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (CSS, L. 451-1 s.). Mais il est connu que le salarié dont l’affection n’est pas prise en charge au titre de la législation sur les accidents du travail ou les maladies professionnelles, peut engager une action contre son employeur sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile contractuelle (Soc. 28 oct. 1997, n° 95-40.509, Bull. civ. V, n° 339 ; D. 1998. 219, note C. Radé ), formulation intégralement reprise par cet arrêt. Par conséquent, cette voie de droit lui est ouverte lorsque son action est considérée comme irrecevable par la juridiction de sécurité sociale et, comme le précise la Cour, l’employeur ne peut...

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