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Autorité de la chose jugée : moyen identique mais demande fondée sur des faits différents

Lorsque, postérieurement à un jugement tranchant une prétention, une nouvelle prétention est formée eu égard à des faits distincts et postérieurs, le demandeur conserve la possibilité d’invoquer un moyen déjà soulevé dans la précédente instance. 

par Mehdi Kebirle 23 juin 2017

C’est un arrêt très intéressant qu’a rendu la première chambre civile le 9 juin 2017. Celui-ci est relatif à la question de l’autorité de la chose jugée et de ses limites, lesquelles méritent parfois d’être rappelées tant l’évolution de la jurisprudence a conduit, au fil du temps, à étendre la portée de ce principe.

La question de droit posée dans cette décision pouvait être ainsi formulée : est-il possible d’invoquer un moyen déjà soulevé dans le cadre d’une précédente instance lorsque la nouvelle demande soumise au juge se fonde sur des faits postérieurs ?

C’est une réponse positive qu’apporte ici la Cour de cassation. En l’espèce, il s’agissait d’un conseil départemental de l’ordre des chirurgiens-dentistes qui a assigné une association de soins dentaires qui employait des chirurgiens-dentistes salariés. Elle entendait obtenir, sous astreinte, le retrait de son site internet de divers reportages, réalisés en 2013, ainsi que la condamnation de l’association au paiement de dommages-intérêts. Elle arguait pour cela que ces actes de publicité étaient interdits par le code de déontologie des chirurgiens-dentistes et invoquait une concurrence déloyale à l’encontre de la profession des chirurgiens-dentistes.

Un jugement irrévocable, rendu le 10 septembre 2013, a accueilli les demandes du conseil de l’ordre sur le fondement de l’article 1382 ancien du code civil. Il a surtout écarté l’application à l’association des dispositions des articles R. 4127-201 et suivants du code de la santé publique, transposant le code de déontologie des chirurgiens-dentistes.

Par la suite, le conseil de l’ordre a de nouveau assigné l’association afin d’obtenir, notamment, le retrait d’un article paru le 9 octobre 2013 sur le site d’un journal régional, d’un reportage sur le site internet d’une chaîne d’information en continu et de mentions à caractère publicitaire sur le site internet de l’association et celui des Pages jaunes. Il demandait également la condamnation de l’association au paiement de dommages-intérêts. Le conseil de l’ordre prétendait que l’association avait eu à nouveau recours à des actes de publicité interdits par le code de déontologie des chirurgiens-dentistes et de concurrence déloyale à l’encontre de la profession des chirurgiens-dentistes.

L’association a été condamnée, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, à retirer certaines mentions publicitaires sur son site internet et sur celui des Pages jaunes et à payer au conseil de l’ordre des dommages-intérêts.

En revanche, la demande du conseil de l’ordre tendant à ce que l’activité de l’association soit soumise aux dispositions des articles R. 4127-201 et suivants du code de la santé publique transposant le code de déontologie des chirurgiens-dentistes fut cependant rejetée. La cour d’appel a considéré que le jugement du 10 septembre 2013, rendu entre les mêmes parties, prises en la même qualité, ayant accueilli les demandes du conseil de l’ordre au seul visa de l’article 1382 du code civil et rejeté les autres demandes, ce après s’être expliqué sur le moyen tiré de la soumission de l’association aux dispositions du code de déontologie des chirurgiens-dentistes, a l’autorité de la chose jugée quant au rejet...

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