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Clauses de non-concurrence et de non-réaffiliation dans les réseaux de distribution : premières précisions sur le champ d’application de la loi Macron

L’article L. 341-2 du code de commerce ne s’applique pas aux seuls réseaux de distribution où une activité de « commerce de détail » est développée. Les activités de services sont également concernées. Le champ d’application du texte est donc augmenté. Opportune, cette orientation permet de contrôler une clause de non-réaffiliation sous le prisme des conditions posées par l’article L. 341-2 précité. L’orientation s’applique également à la règle « d’échéance commune », siégeant à l’article L. 341-1 du code de commerce. L’arrêt opère, en outre, un contrôle et une sanction des clauses de non-réaffiliation à l’aune du régime prétorien, applicable avant l’entrée en vigueur de la loi Macron.

1. La loi Macron avait notamment pour objectif de faciliter la mobilité des membres de réseaux de distribution vers des réseaux concurrents. Cet objectif politique s’est traduit par la création des articles L. 341-1 et L. 341-2 du code de commerce (Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, art. 31). Le premier pose la règle « d’échéance commune » selon laquelle les différents contrats permettant l’exploitation du magasin doivent s’achever à la même date (sur la conformité de cette règle à la constitution, Cons. const. 5 août 2015, n° 2015-715, §§ 19 s., Loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, AJDA 2015. 1570 ; D. 2016. 807, obs. P. Lokiec et J. Porta ; ibid. 1461, obs. N. Jacquinot et A. Mangiavillano ; Constitutions 2015. 421, chron. A. Fabre ; RTD com. 2015. 699, obs. E. Claudel ). Le second pose des conditions de validité assez strictes aux clauses ayant pour effet de restreindre la liberté de l’exploitant du magasin, reprenant ici la logique du droit européen (anc. règl. [UE] n° 330/2010 du 20 avr. 2010, remplacé par règl. [UE] n° 720/2022 du 10 mai 2022).

2. La principale difficulté est que le dispositif instauré repose sur la notion de « magasin de commerce de détail » (C. com., art. L. 341-1, al. 1er). Schématiquement : sont d’un côté envisagées les têtes de réseaux et, d’un autre, toute personne exploitant un magasin de commerce de détail. Or, la portée de cette expression est des plus incertaines. Faut-il en déduire que les activités de service, et donc les franchises de service, sont exclues ? L’interrogation est parfaitement légitime, d’autant que les enjeux pratiques sont importants : soit les clauses restreignant la mobilité relèvent du régime strict de la loi Macron (infra, § 8), soit celles-ci continuent de relever du régime prétorien antérieur plus souple (infra, § 14).

3. C’est dans ce contexte que l’arrêt commenté intervient. Les faits sont habituels. Plusieurs contrats de franchise sont conclus dans le réseau d’agences immobilières Century 21. Ces contrats sont résiliés par le franchisé. L’ex-franchisé apporte son activité de « transaction immobilière » à une nouvelle société. L’ex-franchisé et la nouvelle société rejoignent un réseau concurrent, le réseau Keller William. Le franchiseur initial (la société Century 21) assigne les deux sociétés pour violation des clauses de non-réaffiliation stipulées dans les contrats.

4. Le litige se cristallise sur l’application, ou non, de la loi Macron. Les agences immobilières – plus généralement les activités de services – peuvent-elles être assimilées à des « commerces de détail » au sens de l’article L. 341-1 du code de commerce ? La cour d’appel admet cette assimilation (Paris, pôle 5 - ch. 4, 8 févr. 2023, n° 20/14328, CCC 2023/4. Comm. 61, note N. Mathey ; LEDICO avr. 2023, n° DDC201l9, obs. M. Behar-Touchais). La Cour de cassation le confirme. Le message envoyé est donc clair : la loi Macron s’applique à tous les types de franchise et, plus généralement, à tous les réseaux de distribution.

5. L’arrêt rendu est également intéressant en raison du contrôle porté sur les clauses de non-réaffiliation. En l’espèce, plusieurs contrats de franchise avaient été conclus : certains avant l’entrée en vigueur de la loi Macron ; d’autres après. On sait que l’application dans le temps de la loi Macron constitue une autre de ses difficultés. L’origine réside dans les dispositions transitoires indiquant que la loi Macron s’applique après un délai d’un an à compter de sa promulgation (Loi n° 2015-990, préc., art. 31, II). Il pouvait donc être défendu que cette loi s’appliquerait aux contrats en cours, le délai d’un an permettant la mise en conformité desdits contrats. La Cour de cassation a toutefois jugé à deux reprises que la loi Macron ne s’appliquait pas aux contrats en cours (Com. 16 févr. 2022, n° 20-20.429, D. 2022. 1022 , note C. Lledo ; ibid. 1419, chron. S. Barbot, C. Bellino, C. de Cabarrus et S. Kass-Danno ; ibid. 2255, obs. Centre de droit économique et du développement Yves Serra (EA n° 4216) ; ibid. 2023. 254, obs. R. Boffa et M. Mekki ; CCC 2022. Comm. 60, note M. Malaurie-Vignal ; LEDICO avr. 2022, n° DDC200s1, note M. Behar-Touchais ; Lettre distrib. 2022/3, p. 4, note L. Bettoni ; 30 août 2023, n° 22-20.076, CCC 2023/11. Comm. 168, obs. N. Mathey). L’arrêt commenté mettant en jeu des contrats conclus avant et après l’entrée en vigueur de la loi Macron, les règles appliquées pour le contrôle des clauses de non-réaffiliation ne sont logiquement pas les mêmes.

6. Ainsi, l’arrêt commenté est l’occasion de préciser les conséquences pratiques liées à l’extension du champ d’application de la loi Macron. Ces conséquences sont doubles : les conditions de validité des clauses de non-concurrence posées par la loi Macron et la règle d’échéance commune s’appliquent à tous les réseaux de distribution. L’arrêt rappelle également le contrôle porté sur les clauses non-réaffiliation avant l’entrée en vigueur de la loi Macron.

Extension du champ d’application de la loi Macron : première conséquence pratique

7. La première conséquence pratique réside dans une application généralisée de la loi...

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