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Conformité constitutionnelle du huis clos de droit à la demande de la partie civile

Le Conseil constitutionnel a déclaré conforme l’article 306, alinéa 3, du code de procédure pénale suivant lequel le huis clos est de droit à la demande de la victime partie civile pour le jugement de certains crimes.

par Marie-Hélène Yazicile 13 septembre 2017

Saisi le 11 mai 2017 d’une question prioritaire de constitutionnalité par la chambre criminelle de la Cour de cassation (Crim. 11 mai 2017, n° 16-86.453), le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la conformité de l’article 306, alinéa 3, du code de procédure pénale. Celui-ci énonce que pour certaines infractions, « le huis clos est de droit si la victime partie civile ou l’une des parties civiles le demande », et ajoute que « dans les autres cas, le huis clos ne peut être ordonné que si la victime partie civile ou l’une des victimes parties civiles ne s’y oppose pas ». Devant cette particularité procédurale, le requérant dénonçait la méconnaissance de cet article au droit à un procès équitable, y voyant une atteinte aux principes de publicité des débats, d’égalité devant la justice et de présomption d’innocence, en somme une contrariété aux articles 6, 8, 9, 10 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Si la question, dénuée de nouveauté, présente un caractère sérieux de nature à permettre la saisine du Conseil constitutionnel, il demeure que le huis clos reste aisément admis par les dispositions conventionnelles. Aussi l’article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l’homme autorise-t-il cette mesure, en des termes assez larges, ce dans plusieurs hypothèses, notamment « dans l’intérêt de la moralité, de l’ordre public ou de la sécurité nationale […], lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l’exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice ». Face à cette formule pour le moins flexible, le législateur de 2016 a trouvé bon d’étendre le huis clos aux victimes de proxénétisme, en plus de celui qui existait – en matière criminelle – pour les mineurs et les victimes « de viol[s] ou de torture et d’actes de barbarie accompagnées d’agressions sexuelles », de même que pour celui prévu en cas de publicité « dangereuse pour l’ordre ou les mœurs » (C. pr. pén., art. 306, al. 1, 2 et 3 ; V. égal. Rép. pén., Cour d’assises, par M. Redon, nos 218-230).

La fermeture de toutes les portes de l’audience (G. Cornu, Vocabulaire juridique, 11e éd., Paris, PUF, coll. « Quadrige. Dicos poche », 2016, Huis clos) interdit au public, précisément aux personnes dépourvues d’autorisation, d’assister aux débats. Par son biais, le législateur a souhaité garantir l’anonymat de ces différentes victimes pendant la procédure judiciaire en évitant, comme l’exigeait par exemple l’article 12.4 de la directive européenne du 5 avril 2011, « toute déposition en audience publique » (Dir. 2011/36/UE du Parlement européen et du Conseil du 5 avr. 2011 concernant la prévention de la traite des êtres humains et la lutte contre ce phénomène ainsi que la protection des victimes et remplaçant la décision-cadre 2002/629/JAI du Conseil). Le huis clos leur attribue en outre « un traitement spécifique », les préserve de toute « victimisation secondaire » que pourrait leur infliger...

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