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La faute inexcusable du transporteur routier de marchandises dans un contexte international

Dans un transport routier international de marchandises, seule la faute inexcusable définie à l’article L. 133-8 du code de commerce auquel renvoie l’article 29 de la Convention de Genève du 19 mai 1956, dite « CMR », est susceptible d’écarter les limitations d’indemnisation. En l’espèce, la faute lourde est écartée. Mais la clause contractuelle qui exonère le transporteur de toute responsabilité pour retard est annulée.

par Xavier Delpechle 24 mai 2018

Il est question, dans cet arrêt de cassation, d’un transport international de marchandises. Les faits, qui rappellent furieusement ceux du premier arrêt Chronopost de la chambre commerciale de 1996 (Com. 22 oct. 1996, n° 93-18.632, Bull. civ. IV, n° 261 ; D. 1997. 121 , note A. Sériaux ; ibid. 145, chron. C. Larroumet ; ibid. 175, obs. P. Delebecque ; RTD civ. 1997. 418, obs. J. Mestre ; ibid. 1998. 213, obs. N. Molfessis ; RTD com. 1997. 319, obs. B. Bouloc ), sont les suivants. Un expéditeur a confié à une société le transport, de France en Belgique, d’un colis contenant un dossier de candidature à un appel d’offres. Le colis ayant été livré en retard, la candidature de la société soumissionnaire a été rejetée. Cette dernière a alors assigné le transporteur en paiement de dommages-intérêts en raison de la perte de l’appel d’offres et des marchés à venir. Les juges du fond rejettent sa demande. Il se pourvoit alors en cassation.

Le premier aspect du pourvoi portait sur le droit applicable. Le soumissionnaire reproche à la cour d’appel de Versailles d’avoir jugé applicable la Convention de Genève du 19 mai 1956 relative au contrat de transport international de marchandises par route, dite « CMR », et d’avoir écarté la faute inexcusable du transporteur. Il est vrai que l’on pouvait avoir un doute sur la règle de droit dont il convenait de faire ici application, car le transport en cause était ici visiblement un transport dit multimodal, l’acheminement du colis à son destinataire n’ayant pas été entièrement réalisé par transport routier, même s’il s’inscrit dans un contrat unique. On ignore cependant quel a été l’autre mode de transport utilisé. Pour la Cour de cassation, la CMR est applicable, car le dommage est survenu à l’issue de la phase terrestre du transport : « ayant constaté que le colis avait été acheminé de France en Belgique et qu’un dommage était survenu lors de la livraison du colis à l’issue d’un transport terrestre, la cour d’appel, sans avoir à effectuer la recherche non demandée invoquée par la première branche, a légalement justifié sa décision de déclarer la CMR applicable ». En réalité, on ignore si le retard dommageable est imputable à la partie terrestre du transport, mais cela est sans importance. Il suffit qu’un retard soit constaté à l’issue de cette phase terrestre pour que la CMR soit applicable. La Cour de cassation ne retient pas le critère de l’accessoire, comme on aurait pu le penser, un tel raisonnement consistant à considérer que le transport est terrestre – et que dès lors la CMR est applicable – si le transport litigieux est principalement terrestre. En réalité, la Haute juridiction fait application de la règle de l’accessoire dans une circonstance différente : lorsque le transport terrestre s’accompagne d’autres prestations...

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