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Indemnisation pour violation du statut protecteur du représentant de section syndicale

Le représentant de section syndicale qui ne demande pas la poursuite de son contrat de travail illégalement rompu a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis son éviction jusqu’à l’expiration de la période de protection, dans la limite de trente mois, durée minimale légale du mandat des représentants élus du personnel augmentée de six mois.

par Loïc Malfettesle 13 juin 2019

Le salarié protégé qui se voit licencié en violation de son statut protecteur peut prétendre à une indemnité souvent lourde pour l’employeur, puisqu’elle couvre l’ensemble des salaires que celui-ci aurait dû percevoir pendant le temps restant à courir de sa période de protection. La jurisprudence est toutefois venue limiter cette indemnité à une durée maximum de deux ans, durée minimale légale du mandat pour le délégué du personnel, augmentée de six mois (Soc. 15 avr. 2015, n° 13-24.182, D. 2015. 926 ; ibid. 1384, chron. E. Wurtz, F. Ducloz, C. Sommé, S. Mariette et N. Sabotier ; JCP S 2015. 1348, note J.-Y. Kerbouc’h, ; V. pour les conseillers prud’hommes, Soc. 3 févr. 2016, n° 14-17.000, D. 2016. 383 ). La question s’était également posée pour le médecin du travail illégalement licencié, dont la durée du mandat n’est pas fixée par la loi. La Cour de cassation avait alors décidé qu’il pouvait prétendre à une indemnité également limitée à trente mois, durée de la protection minimale légale accordée aux représentants du personnel (Cass., avis, 15 déc. 2014, n° 14-70.009, D. 2015. 82, et les obs. ). L’arrêt rendu le 15 mai 2019 présentement commenté s’inscrit dans le prolongement de ces solutions et livre celle relative au représentant de section syndicale.

Dans l’espèce, un salarié a été désigné en qualité de représentant de section syndicale en novembre 2012, puis a été licencié pour faute grave un peu plus de trois mois après cette désignation, sans que ne soit sollicitée l’autorisation de l’inspecteur du travail. Il a ensuite signé un accord transactionnel avec son employeur aux termes duquel il renonçait à contester son licenciement en contrepartie du versement d’une certaine somme. L’intéressé a toutefois saisi les juridictions pour que soit prononcée la nullité de son licenciement.

Les juges du fond condamnèrent l’employeur – après avoir constaté la violation du statut protecteur dont bénéficiait le salarié – à payer à ce dernier une somme correspondant au montant des salaires qu’il aurait perçus jusqu’au terme de sa période de protection de ce dernier, soit pendant trente-six mois (de novembre 2012 à novembre 2015).

La société a alors formé un pourvoi en cassation. La chambre sociale de la Cour de cassation a, au visa des articles L. 2411-1, L. 2411-3 et L. 2142-1-2 du code du travail, cassé l’arrêt d’appel en rappelant que le représentant de section syndicale qui ne demande pas la poursuite du contrat de travail illégalement rompu a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale à la rémunération qu’il aurait perçue depuis son éviction jusqu’à l’expiration de la période de protection, mais seulement dans la limite de trente mois, durée minimale légale du mandat des représentants élus du personnel augmentée de six mois.

Ce faisant la Cour rappelle et précise la portée de sa jurisprudence concernant la limitation de l’indemnité due en cas de violation du statut protecteur d’un représentant de section syndicale. Celle-ci se voit ainsi limitée à la durée de la période de protection, avec un maximum de trente mois d’indemnisation.

La solution a le mérite d’être clairement affirmée, et n’allait pas nécessairement de soi. La limitation de l’indemnisation à trente mois concernait en effet les représentants du personnel, et la justification tenait au fait que la durée minimale légale du mandat était de deux ans, et que la protection s’étendait six mois au-delà de la fin du mandat. La transposition du raisonnement concernant le représentant de section syndicale, qui est désigné pour une période correspondant à la durée d’un cycle électoral pouvait prêter à discussion. C’est toutefois dans un salutaire souci d’homogénéité que les Hauts magistrats ont étendu la restriction à cette catégorie de salarié protégé.