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L’erreur du greffe absout celle de l’avocat

L’erreur, imputable au greffe, et concernant l’identité des parties, ne saurait être supportée par la partie, même représentée par un avocat, puisqu’elle porterait atteinte au droit d’accès à un tribunal.
En conséquence, l’acte de notification émanant du greffe, contenant une indication erronée quant à l’identification des parties au procès, ne fait pas courir le délai d’appel.

Un salarié engage une action devant la juridiction prud’homale à l’encontre de son employeur, la société « Les Coopérateurs de Normandie Picardie » (CNP).

Cependant, par erreur, l’en-tête du jugement, notifié par le greffe, indique comme partie en défense la « Société Normande de Distribution » (SND).

Ce n’est pas seulement une erreur de dénomination, s’agissant de deux entités juridiques distinctes, même si les deux sociétés sont liées par ailleurs.

Se conformant aux seules indications portées en en-tête du jugement, le salarié fait appel contre la société SND, un tiers, sans intimer le véritable employeur, la société CNP.

Une irrecevabilité est soulevée, en application de l’article 547.

Le salarié fait alors appel contre son véritable employeur, CNP, mais passe le délai d’appel.

Le premier appel, intimant une personne morale non partie à l’instance, est déclaré irrecevable et aucun déféré n’est formé.

Se pose alors la question du sort du second appel, dirigé contre la bonne partie, mais formé passé le délai de recours.

Par arrêt sur déféré du 18 novembre 2020, l’appel est déclaré irrecevable, pour tardiveté (Amiens, 5e ch. prud’h., 18 nov. 2020, n° 20/01639).

L’arrêt est cassé.

L’article 6, souvent nommé, rarement élu

L’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, est l’article que l’avocat brandit en dernier recours, lorsqu’il est en difficulté pour avoir manqué un délai ou une formalité.

Et bien souvent, alors, personne n’y croit vraiment, surtout le principal intéressé. C’est la « défense Calimero », consistant à traduire en termes juridiques le « c’est trop injuste » si le client est privé d’un procès parce que l’avocat s’est pris les pieds dans le code rouge.

Mais cet article ne peut se résumer à cela.

Et il constitue parfois une véritable porte de sortie, notamment dans des hypothèses improbables, lorsque le code de procédure civile ne suffit pas pour que les droits des parties soient préservés.

L’article 6, § 1, duquel découle le principe de sécurité juridique, implique que de nouvelles règles, prises dans leur ensemble, soient accessibles et prévisibles et n’affectent pas le droit à l’accès effectif au juge, dans sa substance même (Civ. 2e, 19 mars 2020, n° 19-12.990 FS-P+B+I, Dalloz actualité, 22 avr. 2020, obs. C. Auché et N. De Andrade ; D. 2020. 2198, chron. N. Touati, C. Bohnert, E. de Leiris et N. Palle ; D. avocats 2020. 210 et les obs. ; RTD civ. 2020. 453, obs. N. Cayrol ), ce qui permet d’interpréter le texte, si ce n’est ajouté au texte.

Ainsi, il a permis de faire courir un délai 908 qui avait pris fin avec l’ordonnance d’irrecevabilité (Civ. 2e, 14 nov. 2019, n° 18-23.631, Dalloz actualité, 4 déc. 2019, obs. R. Laffly ; Procédures, févr. 2020, obs. H. Croze) ou en raison de la modification des règles concernant l’aide juridictionnelle (Civ. 2e, 4 juin 2020, n° 19-24.598, P, Dalloz actualité, 1er juill. 2020, obs. C. Auché et N. De Audrade ; D. 2020. 1235 ; ibid. 2198, chron. N. Touati, C. Bohnert, E. de Leiris et N. Palle ; JCP 2020. 982 note Grayoy-Dirx ; 19 nov. 2020, n° 19-16.792 F-P+B+I, Dalloz actualité, 10 déc. 2020, obs. C. Auché et N. De Andrade ; D. 2020. 2350 ).

C’est également sous couvert de cet article que la Cour de cassation a différé l’application d’une « interprétation nouvelle » résultant d’un arrêt publié (Civ. 2e, 17 sept. 2020, n° 18-23.626 P, Dalloz actualité, 1er oct. 2020, obs. C. Auché et N. De Andrade ; D. 2020. 2046 , note M. Barba ; ibid. 2021. 543, obs. N. Fricero ; ibid. 1353, obs. A. Leborgne ; AJ fam. 2020. 536, obs. V. Avena-Robardet ; D. avocats 2020. 448 et les obs. ; Rev. prat. rec. 2020. 15, chron. I. Faivre, A.-I. Gregori, R. Laher et A. Provansal ; RTD civ. 2021. 479, obs. N. Cayrol ; Procédures, n° 11, nov. 2020, obs. R. Laffly ; 20 mai 2021, n° 19-22.316 et n° 20-13.210 P, Dalloz actualité, 4 juin 2021, obs. C. Lhermitte ; D. 2021. 1217 , note M. Barba ; ibid. 2022. 625, obs. N. Fricero ; AJ fam. 2021. 317, édito. V. Avena-Robardet ; ibid. 381, édito. V. Avena-Robardet ).

C’est encore en application de l’article 6, § 1, que la Cour de cassation a admis que la requête remise par voie électronique est possible avant le 1er septembre 2020 (Civ. 2e, 8 déc. 2022, n° 21-14.144, Dalloz actualité, 13 janv. 2023, obs. C. Bléry).

Il peut aussi constituer la lumière permettant d’éclairer des articles du code de procédure civile, comme pour permettre à l’appelant d’étendre son appel, par une déclaration complétant les chefs de dispositifs critiqués par la précédente déclaration d’appel, dans le délai imparti à l’appelant pour...

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