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Mandat d’arrêt européen : reconnaître, c’est juger

Un mandat d’arrêt européen peut être émis par un État membre pour l’exécution du jugement rendu par un État tiers, reconnu et exécuté par l’État d’émission. L’État d’exécution ne peut alors s’y opposer en invoquant le fait que l’infraction a été commise hors du territoire de l’État d’émission.

par Thomas Bessele 2 avril 2021

Un ressortissant lituanien est arrêté en janvier 2014 en Norvège en possession d’une quantité importante de stupéfiants qu’il s’était engagé à livrer depuis la Lituanie en contrepartie d’une somme d’argent. Il est condamné définitivement, le 28 novembre suivant, à une peine de quatre ans et six mois d’emprisonnement par un tribunal norvégien du chef de « livraison illégale d’une très grande quantité de stupéfiants ». Le 18 juin 2015, un tribunal lituanien reconnaît le jugement norvégien en vertu d’un accord bilatéral du 5 avril 2011 liant les deux États, afin que la condamnation puisse être exécutée en Lituanie. Les autorités norvégiennes remettent l’intéressé aux autorités lituaniennes le 7 avril 2016. Par la suite, celui-ci bénéficie d’une mesure de libération conditionnelle accompagnée de mesures de « surveillance intensive » auxquelles il se soustrait, conduisant un tribunal lituanien à ordonner l’exécution du reliquat de sa peine, soit un an, sept mois et vingt-quatre jours. L’individu prend la fuite pour l’Irlande et les autorités lituaniennes émettent un mandat d’arrêt européen le 24 mai 2018 en vue de sa remise.

Il est arrêté et condamné par la High Court irlandaise à une peine d’emprisonnement pour des infractions de possession de stupéfiants. À l’occasion de la procédure initiée parallèlement pour la mise en œuvre du mandat d’arrêt européen émis par la Lituanie, l’intéressé conteste sa remise aux autorités lituaniennes devant la juridiction de renvoi irlandaise. Celui-ci estime, d’une part, que seule la Norvège pouvait demander son extradition et, d’autre part, que l’Irlande devait refuser l’exécution du mandat en raison du fait que l’infraction avait été commise dans un autre État que l’État d’émission, en particulier dans un État tiers à l’Union européenne. La High Court, tout en notant que des actes préparatoires avaient été commis en Lituanie, décide de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) de deux questions préjudicielles.

Toute la problématique résidait ici dans l’interprétation de la décision-cadre 2002/584/JAI du 13 juin 2002 relative au mandat d’arrêt européen, en...

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