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Nouvelles attributions du conseiller de la mise en état concernant les fins de non-recevoir : faire simple aurait été trop compliqué ?

Les nouvelles attributions du conseiller de la mise en état, lui donnant compétence pour connaître des fins de non-recevoir autres que celles de l’article 914 du code de procédure civile, lui ont été conférés qu’autant que l’ordonnance statuant sur la fin de non-recevoir était susceptible de déféré en application de l’article 916 de ce même code, soit à compter du 1er janvier 2021. C’est donc à raison que la cour d’appel, sur déféré, a déclaré le conseiller de la mise en état incompétent pour connaître d’une fin de non-recevoir dont il a été saisi postérieurement au 1er janvier 2020, mais antérieurement au 1er janvier 2021.

Un appel est formé par deux Comités économiques et sociaux (CSE) à l’encontre d’un jugement qui, ayant fait droit à l’exception de procédure, a annulé la requête conjointe des CSE.

En appel, l’intimé, par conclusions du 20 mai 2020, saisit le conseiller de la mise en état d’un incident d’irrecevabilité – a priori de la déclaration d’appel, des conclusions et des demandes, pas moins… – pour « défaut de pouvoir, défaut de capacité à ester en justice, pour demandes sans objet, pour défaut de droit d’agir en justice, pour le défaut de qualité à agir en justice, pour défaut d’intérêt à agir en justice » ; le tout en demandant au conseiller de la mise en état de confirmer le jugement dont appel. C’est ce qui ressort de la lecture de l’arrêt d’appel sur déféré (Paris, pôle 6 - ch. 1, 2 mars 2022, n° 20/07980).

L’incident est rejeté par le conseiller de la mise en état par ordonnance de mise en état déférée à la cour d’appel.

C’est la cour d’appel qui d’office interrogera les parties d’une part quant à la compétence du conseiller de la mise en état pour connaître de ces fins de non-recevoir – qui au demeurant, pour certaines, relèvent de la nullité pour irrégularité de fond – et d’autre part quant à la compétence de la cour d’appel, sur déféré, pour se prononcer sur des fins de non-recevoir tranchées par le premier juge et confirmer le jugement dont appel.

En définitive, comme l’arrêt avant dire-droit sur déféré pouvait le laisser présager, la cour d’appel déclare le conseiller de la mise en état incompétent.

Non satisfait, l’intimé fait un pourvoi, qui est rejeté.

De nouveaux pouvoirs pour les procédures d’appel formées à compter du 1er janvier 2020…

Il n’est pas certain que tel était à l’origine dans l’esprit du législateur, mais la réforme de la procédure civile de première instance (Décr. n° 2019-1333 du 11 déc. 2019) a provoqué des dommages collatéraux, et a affecté la procédure en appel. Rappelons à cet égard l’improbable bordereau de communication de pièces qui devait accompagner la déclaration d’appel, qui reste tout de même la conséquence la plus absurde de cette réforme sur la procédure d’appel.

En élargissant les pouvoirs juridictionnels du juge de la mise en état à toutes les fins de non-recevoir (C. pr. civ., art. 789 ; mod. par décr. n° 2019-1333 du 11 déc. 2019, art. 4), le législateur a nécessairement touché à ceux du conseiller de la mise en état, la faute à un article 907 qui renvoie aux textes concernant la procédure de première instance. À cet égard, doit être saluée l’excellente idée du législateur de mettre fin à ce renvoi, à l’occasion de la réforme à venir de la procédure d’appel.

Mais ce qui devait s’appliquer sans trop de difficulté à un juge de la mise en état, pose davantage problème lorsqu’il s’agit d’un conseiller de la mise en état.

Et la première question qui s’était posée était celle de savoir à quel moment le conseiller de la mise en état était compétent pour connaître de ces « nouvelles » fins de non-recevoir, celles dont il n’avait pas à connaître jusqu’alors.

Prenant un peu tout le monde de court, la Cour de cassation avait adopté une conception certainement discutable, et discutée, de la notion d’instance, en se référant à un arrêt de 1962 (Cass., ass. plén., 3 avr. 1962, n° 61-10.142 P), pour considérer, dans un avis de juin 2021 (Civ. 2e, avis, 3 juin 2021, n° 21-70.006, Dalloz actualité, 17 juin 2021, obs. R. Laffly ; ibid., 18 juin 2021, obs. J. Jourdan-Marques ; D. 2021. 1139 ; ibid. 2272, obs. T. Clay ; ibid. 2022. 625, obs. N. Fricero ; 11 oct. 2022, n° 22-70.010, Dalloz actualité, 18 oct. 2022, obs. R. Laffly ; D. 2022. 2015 , note M. Barba et T. Le Bars ; ibid. 2023. 915, chron. F. Jollec, C. Bohnert, S. Ittah, X. Pradel, C. Dudit et J. Vigneras ; Rev. prat. rec. 2022. 5, chron. O. Cousin et O. Salati ), que l’appel était une instance à part entière. Cette thèse ne s’imposait pas,...

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