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La réforme ferroviaire, tout sauf une surprise

La brièveté du texte – huit articles – suffit à mettre le feu aux poudres : la réforme de la SNCF passera par une loi habilitant le gouvernement à recourir aux ordonnances.

par Jean-Marc Pastorle 16 mars 2018

Tout reste à écrire donc, en ce sens, le « nouveau pacte ferroviaire » n’est pas une surprise. Présenté en conseil des ministres le 14 mars par la ministre des transports, Élisabeth Borne, il confirme les annonces en quatre axes faites par le premier ministre en février (AJDA 2018. 420 ).

Transformer la SNCF

L’article premier concerne la forme juridique du groupe ferroviaire et confirme l’arrêt des recrutements au statut des cheminots. Le gouvernement pourra « modifier les missions, l’organisation, la gouvernance et la forme juridique du groupe public ferroviaire et des entités qui le composent, sans remettre en cause leur caractère public ». Il lui donne également l’opportunité de revoir la gestion de l’emploi, notamment les conditions de recrutement, et les modalités de la négociation sociale d’entreprise « pour gagner en souplesse et en réactivité », sans remettre en cause le principe de l’unité sociale du groupe public ferroviaire.

L’ouverture à la concurrence

Les articles 2 à 5 organisent l’ouverture à la concurrence par la transposition de la directive 2012/34/UE établissant un espace ferroviaire unique européen. Dès la fin de l’année 2020, « toute entreprise ferroviaire disposera d’un droit d’accès à l’infrastructure ferroviaire nationale », précise le texte. L’ordonnance devra notamment déterminer, en cas de changement d’attributaire d’un contrat de service public, les conditions dans lesquelles est assurée la poursuite des contrats de travail des personnels nécessaires à l’exploitation et à la continuité du service public. Elle précisera le devenir des conventions et accords d’entreprise existants dans un tel cas.

Le gouvernement aura fort à faire à l’égard des voyageurs. Il devra déterminer l’évolution du cadre de tarification des billets, préciser les règles en matière de vente, d’information, d’assistance, de réacheminement et d’indemnisation des voyageurs.

Une ordonnance devra assurer la transposition le pilier « technique » du quatrième paquet ferroviaire et notamment des directives (UE) 2016/797 et 2016/798 du 11 mai 2016. Elle précisera l’indépendance du bureau d’enquête sur les accidents de transports terrestres, dans l’ouverture et la conduite des enquêtes, et mettra en œuvre la nouvelle répartition des compétences entre l’établissement public de la sécurité ferroviaire et l’Agence de l’Union européenne pour les chemins de fer.

L’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, consultée sur un projet de texte réglementaire, disposera d’un délai de deux mois pour rendre son avis. Un délai qui pourrait fondre à deux semaines sur demande du premier ministre. Enfin, le gouvernement sera habilité à prendre des mesures pour sécuriser l’établissement des redevances d’infrastructure et renforcer leur prévisibilité, en modifiant les conditions de fixation des péages.

Feuille de route

Élisabeth Borne, ministre chargée des transports, a reçu, le 15 mars, la feuille de route de la direction de la SNCF en vue d’établir le futur projet stratégique de l’entreprise. Les trois établissements publics industriel et commercial (EPIC) actuels – SNCF, SNCF Mobilités et SNCF Réseau – ont jusqu’au mois de juillet pour rédiger leur plan par activités. Ils devront mettre en place une concertation interne sur la polyvalence des métiers, le renforcement de la productivité ou encore l’alignement des coûts sur les standards européens. Le plan stratégique « Nouvelle SNCF » – qui devrait être présenté fin juillet – reposera sur sept piliers qu’a détaillés Patrick Jeantet, président-directeur général de SNCF Réseau : un réseau haute performance, des offres compétitives, une organisation unifiée et intégrée, un management décentralisé, une entreprise digitale, un groupe industriel de services, des salariés accompagnés.

Élisabeth Borne a confirmé la disparition des trois EPIC au profit d’une société nationale à capitaux publics, à titre non cessibles. Elle devra créer une unité des métiers ferroviaires dans le respect des règles européennes. Pour restaurer l’équilibre économique du système, plusieurs sujets sont sur la table : l’investissement dans la rénovation du réseau, la modification de l’indexation et de la structuration des péages ou encore l’adaptation de la fiscalité spécifique au transport ferroviaire. « Sur la dette, l’État prendra sa part de responsabilité », a précisé la ministre. Elle a enfin affirmé que la fermeture des petites lignes n’était pas d’actualité, l’État, ayant clairement donné sa position, maintiendra son engagement prévu dans le cadre des contrats de plan État-régions.