Accueil
Le quotidien du droit en ligne
-A+A
Article

Responsabilité pénale des personnes morales et identification des représentants

Est conforme à l’article 121-2 du code pénal l’arrêt d’une cour d’appel qui condamne une société pour blessures involontaires du fait de la faute commise par un de ses représentants, chef de chantier, qui n’a pas pris les mesures permettant d’éviter un accident causant des blessures à un employé.

par Delphine Le Drevole 8 février 2013

Le salarié d’une société est blessé au cours d’un accident survenu alors qu’il participait à une opération de décâblage de télésiège réalisée par son chef d’équipe, sous le contrôle du chef de chantier. La société l’employant est poursuivie devant le tribunal correctionnel pour blessures involontaires ayant entraîné une interruption du temps de travail (ITT) supérieure à trois mois (C. pén., art. 222-19, al. 1er). Les juges du fond entrent en voie de condamnation contre la société poursuivie. La Cour de cassation rejette le pourvoi, confirmant par là l’engagement de la responsabilité de la personne morale.

Si l’article 121-2 du code pénal pose le principe de l’engagement de la responsabilité des personnes morales pour les infractions commises pour leur compte par leurs organes ou représentants, on sait qu’un certain laxisme jurisprudentiel a pu prospérer concernant l’identification de ces organes ou représentants. En effet, la Cour de cassation avait instauré, dans le cadre des infractions non intentionnelles, une véritable présomption d’imputation de l’infraction à un organe ou à un représentant sans qu’il ne soit fait besoin d’identifier l’auteur des manquements constitutifs du délit (Crim. 20 juin 2006, n° 05-85.255, Bull. crim. n° 188 ; D. 2007. Jur. 617, note J.-C. Saint-Pau ; ibid. Pan. 399, obs. G. Roujou de Boubée, T. Garé et S. Mirabail ; ibid. 1624, obs. C. Mascala ; AJ pénal 2006. 405, obs. P. Remillieux ; Rev. sociétés 2006. 895, note B. Bouloc ; RSC 2006. 825, obs. Y. Mayaud ; RTD com. 2007. 248, obs. B. Bouloc ; JCP 2006. II. 10199, note E. Dreyer). Cette solution avait par la suite été étendue au cas des délits intentionnels (Crim. 5 juin 2008, n° 07-80.261, Bull. crim. n° 167 ; D. 2008. 2287 ; ibid. 2009. Pan. 1441, obs. Centre de droit de la concurrence Yves Serra (équipe d’accueil n° 4216 du Centre de droit économique et du développement) ; ibid. Pan. 1723, obs. C. Mascala ; ibid. Pan. 2888, obs. D. Ferrier ; Rev. sociétés 2008. 873, note H. Matsopoulou ; RSC 2009. 89, obs. E. Fortis ; RTD com. 2009. 218, obs. B. Bouloc ; Dr. pénal 2008. Comm. 140 [2e esp.], obs. M. Véron). Puis, semblant se diriger vers une responsabilité directe des personnes morales, la chambre criminelle dans un arrêt du 9 mars 2010 ne faisait plus aucune référence à l’identification de l’organe ou du représentant de la personne morale (Crim. 9 mars 2010, n° 09-80.543, Dalloz actualité, 1er juin 2010, obs. S. Revel ; D. 2010. Jur. 2135, note J.-Y. Maréchal ; AJ pénal 2010. 341 ; RSC 2010. 617, obs. Y. Mayaud ). Ces décisions ont essuyé de nombreuses critiques, aussi, s’est-on réjoui quand un arrêt de la chambre criminelle du 11 octobre 2011 a, semble-t-il, amorcé un certain « retour à l’orthodoxie », en exigeant de nouveau l’identification du statut et des attributions des organes ou représentants de la personne morale (V. Crim. 11 oct. 2011, n° 10-87.212, Dalloz actualité, 30 oct. 2011, obs. M. Bombled ; ibid. 2012. Pan. 1698, obs. C. Mascala ; ibid. Pan. 2917, obs. G. Roujou de Boubée, T. Garé, M.-H. Gozzi, S. Mirabail et T. Potaszkin ; AJ pénal 2012. 35, note B. Bouloc ; Rev. sociétés 2012. 52, note H. Matsopoulou ; Dr. soc. 2012. 93, obs. F. Duquesne ; ibid. 720, chron. R. Salomon et A. Martinel ; RSC 2011. 825, obs. Y. Mayaud ; RTD com. 2012. 201, obs. B. Bouloc ). Ce « revirement » a été suivi comme en témoigne un arrêt du 2 octobre 2012 dans lequel la chambre criminelle a réaffirmé la nécessité pour les juges du fond d’identifier les organes et représentants agissant pour le compte de la personne morale (Crim 2 oct. 2012, n° 11.84-415, Dalloz actualité, 9 nov. 2012, obs. L. Priou-Alibert ; ibid. Pan. 1698, obs. C. Mascala ; ibid. Pan. 2917, obs. G. Roujou de Boubée, T. Garé, M.-H. Gozzi, S. Mirabail et T. Potaszkin ; AJ pénal 2012. 415, obs. B. Bouloc ; Dr. soc. 2012. 720, chron. R. Salomon et A. Martinel ; ibid. 2013. 142, chron. R....

Il vous reste 75% à lire.

Vous êtes abonné(e) ou disposez de codes d'accès :