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Trois questions à…Bernard Even, président du Syndicat de la juridiction administrative

Bernard Even livre à l’AJDA ses réflexions sur la mise en œuvre de la loi sur l’immigration de juillet 2006, celles que lui inspire la mise en place des groupes de travail par le nouveau vice-président du Conseil d’Etat et les attentes de son syndicat à l’égard du nouveau gouvernement en ce qui concerne la justice administrative. Pour lui, le nouveau gouvernement doit instituer des recours administratifs préalables obligatoires, notamment dans le contentieux de la fonction publique.

par S. Brondelle 22 mai 2007

Votre syndicat a manifesté son inquiétude lors de l’élaboration de la dernière loi sur l’immigration. Celle-ci commence à être mise en œuvre. Vos craintes se trouvent-elles confirmées ?

Elles se sont ravivées. Je m’explique. Le nouveau dispositif de l’obligation de quitter le territoire français (OQTF) repose, au regard des logiques contentieuses, sur un pari : que la fusion entre le contentieux du séjour et celui de l’éloignement des étrangers aboutisse à une réduction globale du nombre de recours. Or, et même si la situation est encore disparate au niveau géographique car les préfectures n’agissent pas de façon homogène, les premières indications concernant la mise en œuvre de la loi révèlent très nettement une forte croissance des recours. Dès lors, sauf à concentrer l’activité des tribunaux administratifs sur le seul contentieux des étrangers au détriment de tous les autres litiges, ce qui est impossible, nous risquons de ne pas pouvoir respecter le délai de trois mois qui nous a été imparti par le législateur. Le Conseil d’Etat doit faire un premier bilan officiel au 30 juin prochain et nous redoutons qu’émerge de ce bilan la nécessité d’imaginer des solutions contestables pour que ce délai de trois mois soit respecté. Vous comprenez bien que nous craignons que resurgisse la mauvaise idée - que nous avions pu écarter grâce à une grève en 2006 - de soumettre l’ensemble du contentieux des étrangers à un juge unique.

Par ailleurs, en matière de refoulement des étrangers, la France va devoir faire évoluer sa procédure contentieuse. La Cour européenne des droits de l’homme a par un arrêt du 26 avril dernier censuré la France au motif que l’article 13 de la Convention exige que l’intéressé ait accès à un recours suspensif. La Cour a jugé qu’en l’absence d’un tel mécanisme, l’étranger ne peut être considéré comme ayant eu droit à un recours effectif. Cette décision ne nous a pas surpris. Il n’existe actuellement qu’un recours de droit commun non suspensif, mal connu des étrangers placés en zone d’attente et très peu enclenché. Mais depuis l’intervention de cette décision, les juges des libertés et de la détention libèrent systématiquement les étrangers placés...

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