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Le Conseil d’État a annulé, le 29 janvier 2018, les dispositions du troisième alinéa de l’article 15.2.2 du règlement intérieur national de la profession d’avocat (RIN) qui, dans leur rédaction issue de la décision à caractère normatif n° 2016-001 des 1er et 2 juillet 2016, ont pour objet de permettre à un avocat exerçant à titre individuel ou à une entité prévue à l’article 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 formée pour l’exercice de la profession d’avocat, de domicilier de façon permanente et effective une partie de son activité dans les locaux d’une entreprise, qui peut être sa cliente.
par Gaëlle Deharole 16 février 2018
Régulièrement posée, la question de l’indépendance de l’avocat revient une nouvelle fois devant les juridictions. L’hypothèse est cependant originale, non seulement parce qu’elle interroge l’indépendance de l’avocat au sein même de la profession à travers la critique d’une décision à caractère normatif du Conseil national des barreaux (CNB), mais également parce qu’elle questionne les conséquences de l’ouverture de bureaux secondaires sur les principes essentiels de la profession.
L’ouverture de bureaux secondaires renvoie à une question lancinante sur la dimension économique de l’exercice de la profession d’avocat. Celle-ci avait déjà suscité d’importants questionnements (v. Dalloz actualité, Le droit en débats, 9 déc. 2014, par B. Lamon ; Dalloz actualité, 19 janv. 2015, art. A. Portmanndossier, 7 nov. 2014, par A. Coignac).
Plus précisément, c’est la modification du Règlement intérieur national (RIN) qui faisait difficulté. Par une décision n° 2016-001 des 1er et 2 juillet 2016, l’Assemblée générale du CNB avait en effet décidé de modifier l’article 15.2.2 du RIN dans les termes suivants : « l’ouverture d’un ou plusieurs bureaux secondaires est licite en France et à l’étranger, sous réserve des dispositions de l’article 8-2 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée. Le bureau secondaire, qui peut être situé dans les locaux d’une entreprise, doit répondre aux conditions générales du domicile professionnel et correspondre à un exercice effectif et aux règles de la profession notamment en ce qui concerne le secret professionnel. L’entreprise au sein de laquelle le cabinet est situé ne doit pas exercer une activité s’inscrivant dans le cadre d’une interprofessionnalité avec un avocat ».
Cette décision à caractère normatif avait été contestée par la profession. Le Conseil d’État était ainsi appelé à se prononcer sur la possibilité pour le CNB de permettre aux avocats d’ouvrir des bureaux secondaires au sein des entreprises. Par l’arrêt du 29 janvier 2018, le Conseil d’État prononce l’annulation de la décision de l’Assemblée générale du CNB modifiant l’article 15.2.2 du RIN.
La haute juridiction rappelle en effet que, si le CNB est compétent pour « arrêter et, s’il y a lieu, modifier les dispositions du Règlement intérieur » (point 4), ce pouvoir trouve une double limite, d’une part, dans les droits et libertés qui appartiennent aux avocats et, d’autre part, dans les règles essentielles de l’exercice de la profession (point 5). Aussi, « le Conseil national des barreaux ne peut légalement fixer des prescriptions nouvelles qui mettraient en cause la liberté d’exercice de la profession d’avocat ou les règles essentielles qui la régissent et qui n’auraient aucun fondement dans les règles législatives ou dans celles fixées par les décrets en Conseil d’État prévus par l’article 53 de la loi du 31 décembre 1971, ou ne seraient pas une conséquence nécessaire d’une règle figurant au nombre des traditions de la profession ». Or les conditions de la domiciliation professionnelle, en particulier les conditions d’ouverture de bureaux secondaires, sont régies par la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 (point 6). Les dispositions litigieuses auraient, selon le Conseil d’État, « pour objet de permettre à un avocat exerçant à titre individuel ou à une entité prévue à l’article 7 de la loi du 31 décembre 1971 formée pour l’exercice de la profession d’avocat de domicilier de façon permanente et effective une partie de son activité dans les locaux d’une entreprise, qui peut être sa cliente » (point 7). Cette disposition aurait, selon la juridiction, pour conséquence « de permettre l’exercice de la profession dans des conditions qui ne correspondent pas à des règles et usages des barreaux et doivent ainsi être regardées comme instituant des règles nouvelles ».
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