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Article
La « procédure de l’arrêt pilote » entre les mains de la garde des Sceaux
La « procédure de l’arrêt pilote » entre les mains de la garde des Sceaux
Jean-Michel Hayat, président du tribunal de grande instance (TGI) de Paris, a remis à la Chancellerie, dans le cadre des « chantiers de la justice » une proposition visant à introduire en droit interne la « procédure de l’arrêt pilote ».
par Thomas Coustetle 26 mars 2018
La procédure dite de l’arrêt pilote est née à Strasbourg en 2004 avec la décision Broniowski contre Pologne. Le procédé permet d’identifier les problèmes structurels sous-jacents aux affaires répétitives contre de nombreux pays et demander aux États concernés de traiter les problèmes en question. Lorsque de nombreuses requêtes ayant la même origine sont introduites devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), la juridiction peut décider d’appliquer à l’une ou à plusieurs d’entre elles un traitement prioritaire selon la procédure dite de « l’arrêt pilote ». La CEDH aura donc pour fonction de se prononcer sur la problématique systémique et de donner au gouvernement concerné des indications claires sur des mesures de redressement qu’il doit prendre pour y remédier.
Et si ce modèle, déjà bien connu à l’échelon européen, était transposé en droit interne ? Jean-Michel Hayat le souhaite pour « tout litige sériel » et l’a fait savoir lors de la rentrée solennelle de la juridiction fin janvier dernier (v. Dalloz actualité, 26 janv. 2018, art. T. Coustet isset(node/188843) ? node/188843 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>188843).
Pour le président du TGI de Paris, l’idée part de ce que « de plus en plus de dossiers portent sur la même question, comportent les mêmes demandes à l’égard d’un même défendeur ». Tout ce contentieux dit « systémique » pourrait alors suivre « un circuit court et prioritaire », envisage-t-il.
Un premier dossier « pilote » serait traité en priorité. Le juge pourrait alors sursoir d’office à statuer pour tous les dossiers « sériels » en attente de la solution rendue. Une fois la solution connue, les « vingt ou quarante » dossiers en cascade pourront être orientés plus facilement « vers la médiation », admet-il. Si la médiation échoue, alors le juge à nouveau saisi pourra également s’appuyer sur une décision connue.
Les avantages de la procédure
Si les contours de cette procédure méritent encore à ce stade d’être précisés, les bénéfices semblent suffisamment évidents, face aux récurrents sujets de crispation des citoyens à l’égard du système judiciaire souvent qualifié de « lourd » et de trop « aléatoire ». Or, justement, cette procédure permettrait « de réduire l’aléa », estime Jean-Michel Hayat. Le médiateur ou le juge aurait en main une décision connue. Les parties seraient naturellement davantage enclines à transiger. Ce modèle serait « utile » pour les demandeurs qui, du même coup, éviteraient cent mises en état, cent jugements et cent appels. Un procès c’est « long et coûteux », rappelle-t-il, « ce qui aboutit à une saturation qui n’est profitable ni pour le service public de la justice ni pour le justiciable lui-même ».
Par ailleurs, avec une décision définitive déjà en main, il sera alors plus facile d’aboutir à une médiation. Ainsi, les plaideurs y gagneraient en simplicité, efficacité et prévisibilité. D’autant que ce procédé permettrait de véritablement « faire décoller la médiation », qui souffre encore aujourd’hui d’un manque cruel d’appétence (v. Dalloz actualité, 13 déc. 2017, art. T. Coustet isset(node/188085) ? node/188085 : NULL, 'fragment' => isset() ? : NULL, 'absolute' => )) .'"'>188085).
Pour quels types de contentieux sériel ?
La procédure aurait vocation à s’appliquer « dans toutes les affaires répétitives », répond Jean-Michel Hayat, c’est-à-dire celles dont l’action concerne un même défendeur et pour une question de droit identique. Cela peut viser le contentieux de la copropriété ; en matière bancaire également, où des dossiers peuvent aller jusqu’à 950 demandeurs, comme en matière de taux effectif global ; voire en matière prud’homale.
« Dans l’affaire des Chibanis par exemple » (v. Dalloz actualité, 13 févr. 2018, art. M. Peyronnetinterview de Me C. De Lesquen, 5 mars 2018, par T. Coustet). En effet, dans ce dossier, les quelque 850 cheminots marocains qui ont demandé réparation à la SNCF ont été placés en départage. Une fois le jugement rendu, la SNCF a fait appel des 850 jugements. « C’est très lourd pour toutes les parties en présence », analyse le haut magistrat, ce que la procédure de l’arrêt pilote aurait, selon lui, permis d’éviter. Une fois un premier dossier connu, les autres cheminots auraient pu négocier à l’appui d’une décision qui leur était favorable.
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