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Aux yeux du grand public, Renaud Van Ruymbeke incarne la figure du juge d’instruction. Un magistrat indépendant et solitaire enquêtant sur la corruption, le financement illégal des partis politiques, parfois en butte aux pouvoirs politiques. Ses Mémoires d’un juge trop indépendant, viennent d’être publiées chez Tallandier.
par Pierre-Antoine Souchardle 18 janvier 2021

« J’ai vécu une époque charnière, avec des grands dossiers, et il est intéressant d’expliquer au grand public comment fonctionne la justice dans ces dossiers-là, surtout dans le débat justice/politique qui est récurrent », indique-t-il à Dalloz actualité pour expliquer la publication de ce livre.
Renaud Van Ruymbeke est parti à la retraite en juin 2019, laissant l’instruction du pôle financier du tribunal judiciaire de Paris – il y avait été nommée en 2000 – sans véritable figure de proue. L’heure n’est plus à la personnalisation des juges, plutôt à celle de leur anonymisation.
Si les ouvrages de magistrats sont plutôt rares, à la différence de ceux d’avocats, plus bavards, celui de Renaud Van Ruymbeke, se veut d’abord un témoignage sur le fonctionnement de la justice avant de livrer des propositions afin de garantir son indépendance face au pouvoir politique et des solutions pour traquer l’argent sale dans les places offshore au moment où les États sont confrontés à des déficits chroniques. À l’échelle mondiale, l’estimation des avoirs d’origines frauduleuses cachés dans des paradis fiscaux, varie entre 8 700 milliards et 36 000 milliards de dollars.
« Guidé par une volonté d’indépendance, j’ai pu mesurer l’ampleur de la soumission de la justice, qui s’est exprimée dans l’action – ou l’inaction – des procureurs. J’ai dû franchir des obstacles et subir des blocages. Mais j’ai aussi constaté, ces dernières années, peu à peu, une certaine émancipation des parquets et un infléchissement du lien de dépendance avec le pouvoir politique », écrit-il en préambule.
Nommé juge d’instruction à Caen à sa sortie de l’École nationale de la magistrature, il va connaître son baptême du feu avec l’affaire Robert Boulin. Le ministre du Travail de Raymond Barre est retrouvé mort dans un étang de Rambouillet le 30 octobre 1979. Le jeune juge enquête alors sur la revente de terrains à Ramatuelle (Var) dont Robert Boulin acquiert quelques parcelles. Il est aussitôt accusé par le monde politique de l’avoir poussé au suicide (NDLR : la famille a toujours privilégié la piste criminelle, une information judiciaire pour meurtre est toujours en cours).
Poursuivi devant le Conseil supérieur de la magistrature, le magistrat est blanchi un an plus tard. « Ma première grande affaire a été une épreuve », écrit-il, « Aucun juge n’est prêt à subir une telle violence (…) J’ai fait le choix de persévérer dans un métier qui me passionne. Mes convictions n’ont pas été affaiblies mais, au contraire, renforcées avec l’idée qui sera mon fil rouge, du respect du principe d’égalité devant la justice ». Une première attaque qui va le marquer et le forger pour le restant de sa carrière professionnelle.
L’ancien magistrat consacre plusieurs chapitres à certains des dossiers qu’il a eu à traiter. Urba, financement du Parti socialiste, Elf, vaste affaire de corruption par le groupe pétrolier, Frégates de Taïwan, rétrocommissions en marge de la vente de frégates militaires, Clearstream, Kerviel…
Outre un rappel contextuel, il revient sur ces affaires qui montrent la lente évolution du rapport de force entre la justice et le pouvoir politique au détriment du second.
La dernière partie du livre contient une série de propositions sur l’indépendance de la justice (Dalloz actualité, 20 juill. 2020, interview) et des moyens pour récupérer l’argent sale à l’abri dans les paradis fiscaux.
« Je reste persuadé que l’indépendance n’est pas uniquement liée à des protections statutaires. Ce qui est fondamental, c’est l’indépendance d’esprit du magistrat. Elle se manifeste à l’égard du pouvoir, mais aussi face à la pression médiatique, vis-à-vis de laquelle il doit garder ses distances », écrit-il.
Il propose donc « de couper le cordon ombilical qui relie le parquet au ministre de la Justice, de confier le pouvoir de nomination au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) « rénové » où les personnalités extérieures devraient être largement majoritaires. Seraient rattachés au CSM l’Inspection générale de la Justice, la carrière des magistrats, l’ENM. Corollaire à cette réforme, la séparation du corps entre juges et procureurs.
Selon l’ancien magistrat, il n’y a jamais eu autant d’argent dans les paradis fiscaux qu’aujourd’hui. Les chapitres qui leur sont consacrés nous offrent une petite leçon de géographie des places pour blanchir les fonds. Suisse, Liechtenstein, Luxembourg hier. Singapour, Hong-Kong, Dubaï aujourd’hui. « Singapour a pris le relais de la Suisse, l’Asie celui de l’Europe », écrit-il. Ici où là-bas, ces places offshore ont comme seule raison d’être « d’empêcher l’identification des comptes ».
La lutte contre les paradis fiscaux ne peut-être mondiale, assure l’ancien magistrat.
Comment éradiquer ce système ? Aujourd’hui, la justice n’intervient qu’au cas par cas, regrette-t-il. « Elle doit désormais changer d’échelle et résoudre le problème dans sa globalité (…) les autorités de poursuites, qu’elle soient françaises ou autres, doivent étendre leurs investigations à l’ensemble des fraudeurs ». L’Europe, estime-t-il, doit « adopter une attitude volontariste et d’exiger de ses membres (…) qu’ils nettoient les écuries d’Augias ». Il propose une circulation sans entraves des informations bancaires au sein des États européens, la création dans chaque pays d’un organisme centralisateur des comptes bancaires (cela existe en France). Autant de « mesures simples » qui « n’empiètent pas sur la souveraineté des États membres ». À l’heure de la mondialisation, cet argent doit être traqué par les démocraties, conclut-il.
R. Van Ruymbeke avec J.-M. Pontaut, Mémoires d’un juge trop indépendant, Tallandier, 300 pages
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Commentaires
S'il y a plus d'argent dans les paradis fiscaux c'est probablement dû à l'émergence de pays pour qui la lutte contre la délinquance en col blanc n'est pas prioritaire.
Ce magistrat respecté pose avec justesse son diagnostic sur l'éternelle question de l'indépendance de la justice, un vieux serpent de mer qui continue inexorablement à agiter la doctrine, alors que toutes les tentatives pour l'améliorer depuis la commission TRUCHE - il y a des décennies - ont lamentablement échoué. S'il insiste à juste titre sur la nécessité avant tout pour le corps de conserver son indépendance d'esprit, n'est-il pas cependant d'évidence que tant que toutes les hiérarchies, au siège ou au parquet, continueront de peser sur les carrières, l'objectif restera largement hors d'atteinte. Sans même savoir pourquoi il en est ainsi, l'opinion a tranché en répondant à tous les sondages que l'institution n'a pas l'indépendance nécessaire pour remplir sa mission avec impartialité.