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Du nouveau en franchise : indivisibilité avec la location-gérance et cession de contrôle du franchiseur sans l’accord du franchisé, malgré l’intuitu personae
Du nouveau en franchise : indivisibilité avec la location-gérance et cession de contrôle du franchiseur sans l’accord du franchisé, malgré l’intuitu personae
La Cour de cassation continue d’exiger l’accord des franchisés pour la réalisation d’opérations portant sur le franchiseur lorsque celles-ci modifient sa personnalité morale. La cession de contrôle n’est donc pas concernée et peut s’opérer sans l’accord des franchisés. La Cour se fonde sur un intuitu personae particulièrement désincarné, logé dans la personne morale du franchiseur (non de ses dirigeants ou actionnaires). Cette conception interroge car déconnectée des préoccupations pratiques des franchisés. L’arrêt invite alors à réfléchir sur ce qu’est l’intuitu personae en franchise. Par ailleurs, l’indivisibilité des contrats de location-gérance et de franchise est retenue. Le non-renouvellement de la location-gérance entraîne donc la caducité de la franchise. Techniquement fondée, la solution fragilise toutefois la situation des franchisés, dont l’engagement peut prendre fin à chaque échéance de la location-gérance.
1. Publié au Bulletin, l’arrêt sous commentaire réussit le tour de force de réunir le droit de la distribution, le droit des sociétés et le droit des contrats. Il s’agit, qui plus est, d’un nouvel épisode de l’affaire Pizza Sprint, largement relayée par la presse économique ou généraliste (Les Échos, 13 oct. 2015 ; Ouest France, 1er juin 2016 et 24 mai 2019). La configuration est connue. En 2016, ce réseau de franchise est cédé à Domino’s par le biais d’une cession de contrôle. Plusieurs contentieux sont liés à ce réseau et à cette cession. Le principal a récemment connu son dénouement : le 28 février 2024, la Cour de cassation a rendu une importante décision relative aux pratiques restrictives de concurrence et à l’action du ministre de l’Économie (Com. 28 févr. 2024, n° 22-10.314, Dalloz actualité, 8 mars 2024, obs. Y. Heyraud ; D. 2024. 420 ; JCP 2024. 525, obs. C. Nourissat ; CCC 2024. Comm. 58, note N. Mathey ; LEDICO, avr. 2024, nos DDC202f2 et DDC202f1, note M. Behar-Touchais ; Gaz. Pal. 30 avr. 2024, n° 15, p. 4, obs. D. Houtcieff ; Concurrences 2-2024, art. nos 118297 et 118320, note N. Ferrier ; Lettre distrib. mars 2024, p. 1, obs. Y. Idani ; Lexbase Affaires, 7 mars 2024, n° 787, obs. V. Téchené). Cet arrêt a notamment statué sur l’une des clauses majeures de la franchise : la clause d’intuitu personae pesant sur le franchisé. La nullité a certes, en l’espèce, été retenue. Mais l’enjeu était ailleurs : la pratique redoutait, depuis l’arrêt d’appel, que cette clause soit systématiquement nulle dès lors qu’elle pesait sur le seul franchisé. La solution est rassurante : c’est bien l’imprécision qui est sanctionnée, non son unilatéralité (sur l’ensemble du débat et la solution, Y. Heyraud, préc., §§ 17 s.).
2. L’arrêt du 28 février statuait donc sur l’intuitu personae pesant sur le franchisé. Mais qu’en est-il de celui pesant sur le franchiseur ? L’arrêt sous commentaire peut entrer en scène. Comprendre le litige suppose d’indiquer que la tête de réseau avait passé deux contrats avec ses membres : un contrat de franchise d’une durée de dix ans et un contrat de location-gérance d’une durée d’un an. Fréquent dans la franchise alimentaire de proximité et de restauration rapide, ce montage est aussi intéressant que dangereux. Intéressant car la tête de réseau conserve des emplacements stratégiques et car le candidat peut s’engager dans l’aventure à moindre coût. Dangereux car les redevances sont doublées (location et franchise), l’exploitant ne peut, en outre, pas valoriser, notamment lors de son départ, le fonds de commerce développé grâce à son activité.
Quelques mois après la cession du réseau Pizza Sprint, la tête de réseau indique que le contrat de location-gérance ne sera pas renouvelé à son terme. Le locataire-franchisé exige toutefois de rester dans les locaux et le maintien des services liés à son contrat de franchise. La tête de réseau argue alors de l’indivisibilité des deux contrats : si la location-gérance a pris fin, la franchise également, ce par le jeu de la caducité.
3. La cour d’appel retient la caducité du contrat de franchise et condamne le locataire-franchisé à payer diverses sommes liées aux loyers de la location-gérance et à la franchise (Paris, pôle 5 - ch. 4, 29 juin 2022, n° 18/19812, D. 2023. 705, obs. N. Ferrier ). Le pourvoi contestait deux points : l’indivisibilité des contrats ; la possibilité de transmettre un réseau de franchise par le biais d’une cession de contrôle sans l’accord du franchisé.
4. La solution de la Cour de cassation est claire : l’indivisibilité des contrats est reconnue, la cessation de la location-gérance entraîne donc la caducité de la franchise (arrêt, §§ 13 s.) ; l’accord du franchisé à la transmission du réseau par cession de contrôle n’est pas requis, sauf évidemment clause contraire (arrêt, § 18).
5. L’arrêt rendu est particulièrement riche, tant sur un plan pratique que théorique. Le principal enseignement est relatif à la transmission d’un réseau de franchise par cession de contrôle. L’arrêt invite ici à questionner l’intuitu personae pesant sur le franchiseur et les conséquences de celui-ci sur la liberté dont dispose le franchiseur lors de la cession de son réseau. Néanmoins, la question de l’indivisibilité des contrats de location-gérance et de franchise ne doit pas être sous-estimée. La solution est techniquement fondée mais elle conduit à fragiliser la situation des franchisés car leur engagement peut prendre fin à chaque échéance annuelle de la location-gérance, ce sans considération de la durée de la franchise.
Analyse théorique : l’intuitu personae réside dans la personne morale du franchiseur
6. L’arrêt invite, tout d’abord, à réfléchir, d’un point de vue abstrait, à l’intuitu personae pesant sur le franchiseur. La formule sonne comme un principe : « le contrat de franchise est conclu en considération de la personne du franchiseur » (arrêt, § 18). En 2008, une formule similaire était utilisée (Com. 3 juin 2008, n° 06-18.007, Dalloz actualité, 12 juin 2008, obs. A. Lienhard ; Lesage (Mme) c/ Distribution Casino France (Sté), D. 2008. 1623 ; ibid. 2009. 2888, obs. D. Ferrier ; Rev. sociétés 2009. 339, note L. Amiel-Cosme ; RTD civ. 2008. 478, obs. B. Fages ; RTD com. 2009. 385, obs. P. Le Cannu et B. Dondero ; JCP E 2008. 2210, note H. Hovasse ; CCC 2008. Comm. 200, obs. M. Malaurie-Vignal). En 2014, un arrêt inédit avait pu semer le doute. Cet arrêt se fondait sur l’appréciation de la cour d’appel qui avait « retenu à bon droit le caractère intuitu personae du contrat de franchise » (Com. 7 janv. 2014, n° 10-18.319, BJS, mai 2014, n° 111x3, p. 335, obs. B. Dondero). On pouvait donc s’interroger sur l’existence systématique d’un intuitu personae pesant sur le franchiseur (B. Dondero, préc., spéc. § 6). En 2024, la formule employée nous semble en faveur d’un intuitu personae qui est inhérent au contrat de franchise. Aucune clause en ce sens ne serait donc requise ; clause qui n’est d’ailleurs jamais stipulée par le franchiseur et dont l’acceptation serait plus que douteuse en cas de proposition par le franchisé.
7. Le contrat de franchise est conclu en considération de la personne du franchiseur. Mais où se loge exactement cet intuitu personae ? La réponse est immédiatement donnée : l’intuitu personae réside dans la personne morale du franchiseur ; « la personne morale en considération de laquelle le franchisé s’est engagé » (arrêt, § 18). Cette formule mérite d’être précisée. La Cour ne s’attarde pas sur le dirigeant ou l’actionnariat du franchiseur, ces aspects sont sans importance (arrêt, § 18). L’essentiel est la personne morale. Mais attention : une personne morale totalement désincarnée, c’est-à-dire, l’entité bénéficiant de la personnalité juridique. Voilà, selon la Cour de cassation, en considération de quoi un franchisé s’engage lorsqu’il intègre le réseau.
8. L’analyse n’emporte pas notre conviction. Un franchisé peut s’engager pour diverses raisons. La plus essentielle est le concept franchisé. Voilà ce que recherche, avant toute chose, un franchisé. C’est ce qui compte pour lui. Osons la formule : un intuitu conceptae. Un franchisé peut, également, s’engager en considération de la personne du franchiseur. Attention : nous visons ici le dirigeant (voire les actionnaires) de ce franchiseur. Dit autrement : les personnes – évidemment physiques – qui incarnent le franchiseur. Cet engagement en considération des personnes peut exister mais il nous apparaît plus modeste que la considération du concept. Tout au plus peut-on réserver le cas des réseaux de micro-franchise où, en raison de la taille limitée, les relations humaines peuvent être fortes. Mais, en tout état de cause, la considération des personnes sera toujours secondaire. Quel franchisé s’engagerait pour des personnes alors que le concept ne le séduit pas ?
Résumons : le concept, certainement ; les personnes, éventuellement… mais on peine à justifier qu’un franchisé s’engage en considération de la personne morale du franchiseur en tant que telle.
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Auteur(s) : Nicolas Rontchevsky; Eric Chevrier; Pascal Pisoni